Les catacombes, passage obligé de tout pèlerinage chrétien à Rome. S'il existe un grand nombre de couloirs souterrains dans la ville éternelle, tous ne sont pas accessibles au grand public. Mais les catacombes de Calixte, Priscille ou Sébastien nous permettent d'étudier des images des IIIè ou IVè siècles. Que nous disent ces nécropoles de la vie des premiers chrétiens ? La revue Le Monde de la Bible consacre son numéro 225 (juin-juillet-août 2018), au thème : "Rome, mystérieuses catacombes". Un dossier pour aller au-delà des mythes et de l'histoire fantasmée.
Les catacombes sont des nécropoles souterraines. À l'époque de la Rome antique, elles "répondent à un problème démographique" qui est de devoir "inhumer le plus de gens possible dans le moins d'espace possible quand le sol est friable", nous dit Marie-François Baslez. Ce sont des "sépultures publiques", pour l'historienne auteure de "Jésus - Dictionnaire historique des évangiles" (éd. Omnibus). Mais la question de savoir si les catacombes sont des nécropoles chrétiennes ou païennes fait débat.
"Depuis le début on a considéré, dans un souci de commémoration et de devoir de mémoire de quête des origines, que c'était des cimetières de l'Église des origines persécutée, précise Aurélien Caillaud, encore aujourd'hui le discours officiel des professeurs de l'Institut pontifical c'est que les catacombes sont chrétiennes." Mais des études comme celle de Philippe Pergola, qui signe l'article "Dans les dédales de sept siècles d’histoire" dans le numéro 225 du Monde de la Bible, montrent par exemple que beaucoup de catacombes "sont nées d'hypogées privés" (les hypogées sont des tombes creusées dans le sol). Ainsi, Aurélien Caillaud rappelle que "dans les catacombes de Domitille, sur 10 hypogées seuls deux sont assurés d'être chrétiens".
Quand on parle d'une Église souterraine, on parle au sens propre comme au sens figuré d'une Église persécutée - comme aujourd'hui en Chine par exemple. Or, "l'Église romaine des trois premiers siècles n'a été persécutée qu'une année par-ci par-là à de rares périodes", explique Marie-Françoise Baslez, pour qui les catacomnes sont "une image paradoxale de l'Église persécutée". De fait, il existe aussi à Rome des cimetières chrétiens de la même époque, qui sont "les signes d'une prise d'importance des communautés chrétiennes".
Objet de légendes, voire de fantasmes, mais aussi lieux de mémoire. Les catacombes ont été redécouvertes au XVIè siècle dans le cadre de la Contre-Réforme. Comme une réponse apportée au protestantisme, "on utilise épitaphes, ossements, figures des martyrs, reliques, images, peintures, pour lutter contre les nouvelles théories du protestantisme", selon l'auteur de la thèse (en cours) "Le décor gravé des épitaphes chrétiennes de Rome (IIIe-VIIe siècles) thèse". "Les érudits vont se traîner un peu ce bagage-là apologétique pendant des siècles et parfois un peu jusqu'à maintenant."
"Il faut bien se rendre compte qu'il n'y a pas d'art monumental chrétien des trois premiers siècles", rappelle Marie-Françoise Baslez. Ce pourquoi l'Église a trouvé dans les catacombes, dès sa reconnaissance officielle par Constantin, "des lieux où investir la mémoire chrétienne".
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