Le 22 mars 1968, suite à l’arrestation de six des leurs, 142 étudiants constituent un mouvement de soutien. Plusieurs, parmi lesquels un certain Daniel Cohn-Bendit, sont traduits devant le Conseil de l’Université de Paris. Le 3 mais à La Sorbonne, une manifestation de soutien des étudiants est programmée, le recteur qui craint une provocation de l’extrême-droite, demande à la police de faire évacuer les lieux. L’affaire va dégénérer.
Le 2 mai, le Premier ministre part pour un voyage officiel de dix jours en Iran et en Afghanistan. Le 10 mai les étudiants manifestent de nouveau en masse et exigent l’évacuation de La Sorbonne ainsi que la libération de quatre de leurs camarades. Dans la soirée, on assiste aux premiers heurts entre la police et les manifestants. De nombreux blessés dans les deux rangs.
Les syndicats appellent à une journée de grève générale le 13 mai. La Vème République vacille sur ses bases. Et s’entame alors la plus grande grève jamais lancée en France. Durant ce temps, le président de Gaulle part à son tour en voyage officiel en Roumanie. Les syndicats vont négocier la sortie de crise avec Georges Pompidou. Sont signés les accords de Grenelle. Le gouvernement entérine l’augmentation générale de 10 % des salaires.
Quand on évoque Mai 68, "au fil des commémorations, il y a une image qui s’était imposée, le quartier latin parisien, des acteurs, les étudiants, et un temps, mai et juin" explique Isabelle Sommier, professeur de sociologie politique à la Sorbonne, précisant que ce triptyque a évolué progressivement, sans offrir de "photographie de la population ordinaire". Le travail de cette dernière a alors consisté à décentrer le regard, en travaillant sur cinq villes de province, en élargissant le temps, et en donnant à la parole à des militants ordinaires.
Ces militants "sont très loin de l’image qui s’est imposée, d’une révolte de jeunes héritiers". Une image totalement fausse car seulement "20 % d’entre eux correspondent à cette population". L’immense majorité de ces personnes sont les enfants de la massification scolaire, les premiers à accéder à l’université. "Ce sont des lieux qu’ils ne connaissent pas. C’est la rencontre de l’altérité. Ces personnes ont le souci de s’élever, ils ont une très grande appétence pour la culture" ajoute Isabelle Sommier.
Les invités s’accordent sur un point important dans cette période : le soutien de certains membres de l’Église, et de certaines associations chrétiennes, envers les militants. Soit pour les aider dans leur action, soit pour les protéger, quand la répression de l’État les menaçait. Un phénomène que l’on retrouve partout, que ce soit à Paris, en Bretagne ou encore à Marseille.
Pour beaucoup de ces militants, des choix politiques et des choix de vie sont nés en mai 68, et ont perduré dans les années 80. "Un certain nombre de ces jeunes politisés en mai 68 sont restés par leur carrière, fidèles à leurs engagements" analyse encore Christian Bougeard, professeur émérite d’histoire contemporaine à l’Université de Bretagne Occidentale.
Reste la question de la violence. Isabelle Sommier explique que pour beaucoup, sur le plan théorique, la violence n’avait pas lieu d’être. "C’est sur le plan stratégique" que cette violence a pu éclore. "Parmi les groupes d’extrême gauche en question, seule la gauche prolétarienne, maoïste, a eu recours à des actions violentes, et a frisé le passage à la lutte armée". Et la sociologue de préciser qu’à cette époque, la violence était très présente.
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