"Le premier devoir d'un écrivain est d’écrire ce qu’il pense, coûte que coûte." Georges Bernanos (1888-1948) est un écrivain qui ne s'est jamais dérobé à la tâche d'écrire et de dire ce qu'il pensait. Pour commémorer l'année Bernanos (les 130 ans de sa naissance, les 80 ans de l'écriture de l'un de ses plus beaux livres "Les grands cimetières sous la lune" et les 70 ans de sa mort), Sarah Brunel reçoit un lecteur exigeant et fidèle compagnon de l'œuvre de Bernanos, Sébastien Lapaque, auteur en 1998 de "Georges Bernanos, encore une fois" (éd. L'Âge d'Homme/Les Provinciales), réédité chez Actes Sud. Il nous parle de "cette singularité à l'égard de la vérité" chez un écrivain dont l'œuvre comporte "deux versants : une œuvre de romancier et une œuvre d'écrivain de combat".
Georges Bernanos fut un écrivain fervent, un romancier et un penseur puissant, courageux, parfois désespéré mais jamais résigné. Une âme qui habita pleinement son siècle et qui est resté en accord avec lui-même et avec sa foi. Tout au long de sa vie, il fit preuve d’une indépendance absolue de jugement, ce qu’il désigna comme une injonction pour lui-même et pour ses lecteurs : une "fidélité sans conformisme".
En 1938, la philosophe Simone Weil venait de découvrir "Les grands cimetières sous la lune", le livre que Bernanos écrivit à Majorque, durant la guerre civile espagnole. Elle lui adressa alors une magnifique lettre : "De tous vos livres, 'Le journal d’un curé de campagne' est à mes yeux le plus beau, du moins de ceux que j’ai lus, et véritablement un grand livre. Pour le dernier, c’est autre chose, j’ai eu une expérience qui répond à la vôtre, quoique bien plus brève mais profonde." On raconte que Bernanos conserva jusqu’à sa mort cette lettre dans son portefeuille.
La question du mal est au cœur de l'œuvre romanesque de Bernanos. Elle nous renvoie à notre condition temporelle, mortelle. Nous rencontrons dans ses romans des hommes et des femmes qui sont éprouvés par un combat sans fin pour faire face, pour tenir debout. Il nous donne à voir la détresse, la méchanceté mais aussi la faiblesse des hommes, de tous ces êtres traversés par le désespoir, le mensonge, l’éloignement de Dieu, repliés sur eux-mêmes mais qui sont appelés à être portés par leur foi, renouvelés par la puissance de l’amour, ouverts à ce qui est imprévisible et inouï, à ce qui laisse place au mystère, au surnaturel.
"J’ai compris que la jeunesse est bénie, qu’elle est un risque à courir, que ce risque est béni." Comment trouver dans ce monde la présence de Dieu ? Bernanos nous donne à voir cette présence, et à nous interroger sur les signes agissants de la grâce dans le réel. Sa pensée est généreuse, porteuse d’espérance dans un monde désenchanté.
Sébastien Lapaque est l'auteur de nombreux romans et essais. Il a été récompensé par le prix François-Mauriac de l’Académie Française pour "Les idées heureuses" (éd. Actes Sud, 1999) et le prix Goncourt de la nouvelle pour son recueil "Mythologie française" (2002). Après un "Sermon de saint François d'Assise aux oiseaux et aux fusées" (2008), il vient de publier un "Sermon de Saint Thomas d'Aquin aux enfants et aux robots".
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