Il y a beau avoir des chevaux dans le parc du séminaire orthodoxe russe dont il est le recteur, le Père Alexandre Siniakov vit bien loin des steppes du Caucase où il a grandi. Ce moine de l'Église orthodoxe vit aujourd'hui à Épinay-sous-Sénart, non loin de Paris. Rencontre avec un homme au parcours atypique, qui a connu la ferme stalinienne et découvert la foi chrétienne grâce à la littérature. Son autobiographie "Comme l'éclair part de l'Orient - Itinéraire d'un pèlerin russe" (éd. Salvator, 2017) a reçu le Prix du livre de spiritualité La Procure - Panorama 2018. Il vient de publier "Détachez-les et amenez-les-moi !" (éd. Fayard).
À la fin des années 80, Alexandre Siniakov était un enfant vivant dans un sovkhoze, ces immenses fermes soviétiques aux rues perpendiculaires et où toutes les maisons, toutes les rues se ressemblent. Des bâtiments surgis ex nihilo dans l'immensité des steppes.
"Au loin quand il fait beau, on voit les sommets enneigés du Caucase mais c'est très loin, au pied de ces montagnes et jusqu'à perte de vue ce sont des plaines, qui, à partir du mois de mai, sont déjà toutes jaunes car il fait très chaud, très sec en été." Peu de couleurs et beaucoup de poussières, que le vent soulève.
Dans son autobiographie, Alexandre Siniakov écrit : "Petit-fils de cosaques illettrés, j'ai été coupé de mes racines par les éducateurs de l'école soviétique qui m'ont encouragé à rougir de mes origines." Ses ancêtres ont participé à des insurrections contre le pouvoir centralisateur de Pierre le Grand (1672-1725) - insurrections réprimées dans le sang, dans les années 1720. Le père d'Alexandre Siniakov est né en Turquie, là où sa famille a fui la répression. "Je suis le premier de ma génération à être né en Russie depuis le XVIIIe siècle."
Dans ce système athée où les question religieuses étaient taboues, Alexandre Siniakov a commencé dès l'âge de 12 ans à remettre en cause l'idéologie ambiante et l'enseignement communiste. "Ce qui m'a permis de voir qu'il y a autre chose que l'idéologie soviétique, qu'il y a autre chose que ce qu'on nous prêchait à l'école et que finalement nos traditions ancestrales n'étaient pas si minables, et puis aussi ce qui m'a amené à la foi, tout cela a une seule racine, c'est la littérature." Mais pas celle qu'il apprenait à l'école, plutôt "la grande littérature."
Tolstoï, Dostoïevski, Tchékov ou encore les auteurs français, anglais, américains... En se liant d'amitié avec les bibliothécaires du village, Alexandre Siniakov a pu accéder librement à la réserve. "La littérature étrangère m'a ouvert vers un autre monde." Et lui a donné l'envie d'apprendre les langues étrangères.
Émission d'archive diffusée en août 2019
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