Cette semaine, la balade de l’été vous emmène à Maredsous. Cette abbaye est sans conteste une des plus connues de notre pays.
Nous la découvrons ensemble aujourd'hui en 2 volets : une visite historique et une visite autour de la bière et du fromage. Suivez-les dès à présent avec nous.
Deux visites, cela signifie aussi deux guides pour nous emmener à travers le site de Maredsous. Nous retrouvons tout d’abord Christian Mattelart pour la partie historique des lieux. Avec lui nous allons découvrir les nombreuses symboliques présentent dans l’abbaye. Ensuite, avec Séréna Frenkel, nous nous rendrons à la fromagerie et dans la nouvelle microbrasserie.
Christian Mattelart est guide à l’abbaye depuis vingt-quatre ans déjà ! Mais avant cela, il est entré à Maredsous en 1976 comme professeur au collège Saint-Benoit. “Ça commence à dater”, nous dit-il avec le sourire. En cinquante ans, il en a appris des choses sur l’abbaye et son histoire et c’est cela qu’il veut partager avec nous aujourd’hui.
Tout d’abord, petit rappel du cours d’Histoire : Le mouvement d’évangélisation en Europe a pris plusieurs siècles, nous explique-t-il. C'est qu'il en a fallu du temps pour changer les coutumes, les traditions, les croyances. “Ce mouvement d'évangélisation est réellement parti des monastères pour ensuite se répandre à toute l'Europe. Et finalement pour en arriver à ce que l'Église exerce une influence déterminante sur le destin de l'Europe.”
“Pour commencer ma visite, je montre toujours le blason de l’abbaye, pour que les visiteurs comprennent que le père abbé a le même rang que l’évêque”, nous explique Christian Mattelart. En effet, le blason montre les attributs du Père abbé, qui sont les mêmes que ceux d’un évêque : la mitre, la crosse, la bague et la croix. Cela signifie que ni l'évêque du diocèse de Namur, ni l'archevêque de Belgique n'ont autorité à l’abbaye. Elle dépend directement de Rome.
“Ce qu’il faut savoir aussi, c’est qu’à Maredsous, les bénédictins remontent au sixième siècle,” ajoute-t-il. Les lieux où nous nous trouvons ont en effet une immense tradition monastique qui a construit l'Europe. La famille Desclée, qui est la famille fondatrice de l’abbaye, “a voulu retourner dans cette grande tradition d'Église, c'est d'abord ça qui est particulier.”
Encore plus particulier ? En 1830, quand la Belgique devient indépendante, il n’y a plus de monastère en activité sur le territoire. “Maredsous sera la première abbaye bénédictine fondée en Belgique après la Révolution française. Avant 1872, il n’y avait rien sur ce grand plateau.” En tout, il aura fallu vingt ans et 450 hommes pour ériger la totalité de l’abbaye.
Le baron Jean-Baptiste Béthune, qui a été l'architecte de Maredsous, a fait naître le retour au Néogothique en Belgique. De là est venue l’idée d’avoir des écoles des métiers d’art. C’est donc de la fondation de l’abbaye qu’est venue l’idée d'avoir des écoles des métiers d'art, les Écoles Saint-Luc.
La première a aujourd’hui été transformée en cafétéria dans laquelle les touristes en visite à l’abbaye peuvent se restaurer. C’est donc là qu'ont pu être enseignés le dessin, la peinture, la sculpture, le travail du bois, du verre ou encore de l’orfèvrerie.
Nous quittons maintenant l’abbatiale pour rejoindre le cloitre de l’abbaye. Le premier cloitre dans lequel nous pénétrons est celui de l’hôtellerie. “Il y a quatre cloitres qui forment un couloir continu pour permettre aux moines de se déplacer d’un lieu à l’autre pour leurs différentes activités en étant toujours dans un passage à couvert.” Depuis le cloître, Christian Mattelart nous fait passer une lourde porte en bois qui mène au jardin au centre du cloître. “Vous allez voir, c’est de toute beauté,” nous dit-il avec le sourire.
“Vous êtes au cœur de l'abbaye”, nous explique-t-il. “Il y a une immense symbolique qui est autour de tout ceci. La cour est un carré et le carré nous vient de la culture grecque. Pour les Grecs, la terre était un carré et cela nous a laissé l'expression “les quatre coins du monde.””
En réalité, comme nous l’explique notre guide, le chiffre quatre occupe tout l’espace de notre vie. Il est d’ailleurs présent dans de nombreuses expressions que nous utilisons dans le langage courant. “Le quatre est donc le terrestre et le trois, c'est le divin. Quatre la terre et trois le ciel, c'est la totalité du savoir et on obtient le sept. Sept jours de la semaine, sept péchés capitaux, sept vertus, sept sacrements de l'Église, les moines prient sept fois par jour.”
Après le carré de la cour, Christian Mattelart nous emmène au centre de celle-ci pour nous faire découvrir la fontaine. “Quelle est la forme géométrique qui symbolise le passage du monde terrestre au monde divin ?” nous demande-t-il. La réponse est la suivante : l'octogone, forme que prend la fontaine, mais aussi la plupart des fonts baptismaux.
Pour en apprendre plus sur le jardin du cloitre et les symboliques des choses à Maredsous écoutez notre entretien avec Chrisitian Mattelart dans la Balade de l'été.
Après le jardin du cloitre, c’est dans le jardin des moines que nous nous rendons. De la, nous pouvons voir les trois pouvoirs des abbayes : le spirituel, le culturel et l’économique.
La bibliothèque de Maredsous est l’une des plus grandes d’Europe avec presque un demi-million d’ouvrages. Certains datent d’ailleurs du onzième siècle. À côté du bâtiment imposant de la bibliothèque se trouve la ferme. “Il faut être conscient que dans une abbaye, la ferme, c'était tout l'outil de production. Ils avaient la ferme, la forge, le moulin, la boulangerie, les étables, les abattoirs…,” nous explique Christian Mattelart, tout en saluant les moines qui rentrent dans l’abbaye.
Avant de nous laisser à la prochaine étape de notre visite, notre premier guide de la journée nous emmène vers le cimetière des moines. C’est dans un lieu de calme et de sérénité que les bénédictins de Maredsous trouvent leur lieu de repos éternel. Deux rangées de croix se font face le long de murets. D’un côté la bibliothèque, que nous venons de longer, et de l’autre un bois.
Sur chaque croix, deux prénoms :
Une seule date apparait sur la croix, celle du décès. “Le décès ici est considéré comme une nouvelle naissance. C'est l'entrée dans la vie éternelle. L'âge qu’ils avaient n’a pas d'importance.”
Nous sommes maintenant prêts à poursuivre notre chemin vers la fromagerie pour y retrouver notre seconde guide de la journée. Mais avant cela Christian Mattelart nous raconte une dernière anecdote. Celle du cappuccino.
“Il faut savoir qu'il y a trois ordres qui suivent la règle Saint-Benoît : les bénédictins, les cisterciens et les trappistes. Les trappistes sont des cisterciens qui viennent eux-mêmes du monde bénédictin. Les couleurs qu’ils portent sont, elles aussi, symboliques. Le noir des bénédictins, c'est la profondeur et le retrait du monde. Les cisterciens vont vouloir s'opposer à l'immense puissance de l'abbaye de Cluny et vont porter un habit blanc. Les trappistes s’habillent de blanc et noir.”
Mais l’histoire ne s’arrête pas là. “Ce qui symbolise la pauvreté dans l'Église, c'est le pain brun. Les franciscains ont une bure brune et certains franciscains, lorsqu'ils sont prêcheurs, ermites et mendiants dans la rue, ont une capuche. On les appelle donc les Capucins. Lorsqu'on introduit le café par Venise au dix-septième siècle et qu'on y met de la mousse de lait, le café prend la couleur de l'habit des Capucins. Et aujourd'hui, vous commandez un cappuccino. Quand vous commandez un cappuccino, vous commandez un religieux franciscain.”
Pour découvrir d'autres anecdotes sur l'histoire de l'abbaye de Maredsous, baladez-vous avec nous dans la Balade de l'été.
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