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Benoite-Vaux, riche mobilier et Art funéraire

Un article rédigé par Bernard Folliot - RCF Lorraine Meuse, le 28 novembre 2022 - Modifié le 17 juillet 2023
Merveilles en LorraineBenoite-Vaux, riche mobilier et Art funéraire

Dans cet article Bernard Folliot apporte un éclairage complémentaire à celui développé au cours de l'émission enregistrée avec Michaël George. Si la richesse de l'art funéraire a été mis en valeur par ce dernier, Bernard Folliot souhaite profiter de cet article qui lui est proposé pour faire un développement sur la richesse de l'édifice.

Michael George et Bernard Folliot © RCF55Michael George et Bernard Folliot © RCF55

À Michaël George, suite à l'émission de RCF, enregistrée avec lui le 1er septembre 2022, à Benoîte-Vaux.  

Une invitation à la vie éternelle plutôt qu'un mémorial

 

          Il me semble un peu lourd de m'appesantir sur l'art « funéraire » dans une église catholique, particulièrement celle du monastère du pèlerinage marial de Notre-Dame de Benoîte-Vaux, dédiée à la Vierge de l'Annonciation. Ce bâtiment nous annonce la bonne nouvelle que Jésus ressuscité est vivant et ne cesse pas de renaître car il est en nous, non seulement dans l'Esprit Saint mais dans le corps de l'Église, les corps baptisés de tous les chrétiens qui viennent y prier. Les iconoclastes qui ont plusieurs fois tenté pendant la Guerre de Trente Ans et pendant la Terreur d'en bannir ou d'y briser la statue de Marie qui porte Jésus n'y ont vu qu'un lieu de mort, digne de mourir avec ses fidèles mais la Vierge de Nazareth survit malgré eux et elle continue à sauver ceux qui ont saisi la nécessité d'adorer en elle son Fils.

          Ici, il n'est pas très judicieux de parler de mort, si l'on comprend bien le sens des ex-voto peints avant la Révolution ou gravés dans le marbre depuis 1870, l'intention des donateurs des objets votifs, la présence visible des statues et des vitraux, des reliques des saints. L'un des plus vénérés par les chanoines réguliers de Notre-Sauveur succédant aux Prémontrés après la Restauration fut saint Pierre-Fourier.  Tout nous parle ici de manière ostentatoire du désir secret, unanime, universel de vie éternelle, d'un combat victorieux face au mal et à la mort dont la passion du Christ toujours en chemin vers la croix reste envers et contre tout l'archétype le plus connu.

Relique Saint Pierre Fourier © RCF Lorraine Meuse Vitrail Saint Pierre Fourier © RCF Lorraine Meuse Statue Saint Pierre Fourier © RCF Lorraine Meuse

Un riche patrimoine artistique

 

          L'église de Benoîte-Vaux est une œuvre d'art ou un ouvrage collectif que les historiens ont cru devoir au génie de César Bagard. Les représentants d'une république laïque l'ont répertoriée comme monument historique mais elle est plus qu'un musée : un présent du Dieu vivant. Le grand architecte qui l'a conçue n'est pas seulement un philosophe éclairé mais la Sagesse même, le représentant de la Loi, le Verbe incarné qui éclaire le monde, l'invoque et l'évoque, le provoque et le conçoit comme un tout. La statue miraculeuse de ce sanctuaire nous suggère que dans sa main la Terre n'est pas une pomme que l'homme pourrait détacher du Ciel dans l'espoir de la croquer. Cette église et cette statue lient la Terre au Ciel, abolissent en elles les catégories philosophiques du temps et de l'espace, de la vie et de la mort. 
 

ND BV

 
        Visiter cette église de style baroque mais de conception tout à fait théologique permet d'en prendre conscience. Nous y rencontrons à travers statues et vitraux une humanité figurée ou transfigurée, réunifiée par le Christ : ses proches et contemporains palestiniens, nazaréens ou juifs (sa famille et ses disciples), quelques saints français bien sûr (Pierre Fourier, Thérèse ou Jeanne, Louis IX, son cousin d'Anjou), deux romains (Grégoire le Grand et Cécile), un allemand (Norbert de Xanten), un égyptien (Antoine le Grand), une syrienne (Marguerite d'Antioche), un algérien (Augustin) et un turc (Nicolas), voués comme les anges apparemment apatrides à tous migrer vers le Ciel où la mort est provisoire, la patrie commune, la vie éternelle.

          Pénétrer dans la nef nous impose de franchir deux murs percés chacun d'un seul passage obligé. Ils se dressent devant nous comme deux iconostases lorsqu'on veut atteindre le transept et toucher la balustrade qui cerne le maître-autel où l'assemblée communie. Le premier mur de façade montre les évangélistes entourant le Christ qui confie à Pierre la clé de cet édifice reconstruit après la guerre de Trente Ans. Les figures du tétramorphe au pied des apôtres nous invitent à combattre comme un lion, à nous sacrifier comme un bœuf, à nous élever comme l'enfant ailé ou l'aigle afin de gagner le ciel et voir la Lumière à l'Est qui dissipe tous les mystères. Au milieu de l'édifice un second mur moins élevé, piédestal du Christ en croix entre Marie et Saint Jean.  Cette sorte de jubé, percé à sa base d'une porte à deux vantaux ajourés en fer forgé sépare la nef d'accueil des pèlerins de la nef où les chanoines prémontrés répartis dans une vingtaine de stalles chantaient les offices. Comme l'arche d'Alliance bâtie par Noé, la grande nef est cloisonnée, et permet quand on le veut d'isoler à certaines heures les bergers de leurs ouailles.     

Jubé © RCF Lorraine Meuse

Un riche patrimoine funéraire

 


          Ce deuxième seuil à franchir sépare les deux autels latéraux consacrés à Antoine le Grand et à Marguerite d'Antioche, saints patrons du couple de donateurs qui ont financé ce décor baroque.  Ces derniers sont enterrés au croisement de la nef et du transept sous une dalle en marbre noir qui rappelle leurs noms et leurs dernières volontés. Si l'on garde en tête le plan d'une église en forme de croix latine, c'est l'emplacement même du Cœur sacré de Jésus. Dominant l'un des autels, un premier blason montrant une échelle identifie Antoine, seigneur de Longchamps, de la famille de l'Escale (de noblesse italienne). Cela pourrait être l'échelle de Jacob. Un second blason montrant des heaumes identifie Marguerite, son épouse, de la famille de Condé (venue des rives de l'Escaut, via les mines de Creutzwald). Le cochon et le dragon attributs diaboliques et respectifs des deux saints très familiers des artistes ont été omis pour honorer les modèles car il n'est pas interdit de penser que le sculpteur ait voulu représenter les deux donateurs défunts en prêtant leurs traits à leurs saints patrons. 

Saint Antoine Sainte Marguerite
Armes d'Antoine Delescalle © RCF Lorraine Meuse Armes Marguerite de Conté © RCF Lorraine Meuse
Dalle funéraire © RCF Lorraine Meuse

          La presque totalité des inscriptions gravées dans le marbre témoigne de guérisons, de survie miraculeuse. Deux plaques funéraires remarquables apposées dans le transept sont pourtant à rattacher à l'art funéraire et aux monuments aux morts. Il s'agit, à droite de l'autel de Saint Joseph, de la liste des prêtres meusiens victimes de la Grande Guerre et, à gauche de l'autel de Saint Nicolas, de la liste bien plus longue des séminaristes morts au champ d'honneur sur les champs de bataille tout proches. Ces mentions funèbres perpétuent ici la tradition bimillénaire instaurée par nos ancêtres de se faire enterrer auprès du chœur de l'église du lieu de notre baptême ou notre consécration dans l'attente du Jugement dernier et dans l'espoir de ressusciter en compagnie du Christ (par Lui, avec Lui, en Lui) et de tous les saints.

Pretres morts pour la France © RCF55 Seminaristes morts pour la France © RCF55

          L'Annonciation n'est qu'une première étape soumise à la gravité avant les trébuchements du chemin de croix, la mise au tombeau, avant l'Ascension, avant l'Assomption. L'annonce de la bonne nouvelle est celle de la vie, de la joie, de l'allégresse, de l'apesanteur, du repos léger. Elle suppose l'éloignement de la Terre, de ses soucis et ses risques, de la souffrance et la mort que l'art funéraire cultive trop parfois jusqu'au dolorisme, au martyre, à la victimisation, au macabre de série noire.

 


          Bien fraternellement !     

 


                                                                                                          Bernard Folliot.

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