« L’Abbé Pierre – une vie de combats » de Frédéric Tellier, projeté hors compétition, c’est une biographie à la facture classique de celui qui fut, quarante ans durant, le préféré des Français. Une biographie portée par un Benjamin Lavernhe, de la Comédie Française, habité par son rôle.
En conférence de presse, l’acteur qui était aussi au générique de « Jeanne du Barry », le film qui a ouvert le Festival il y a douze jours, raconte comment il s’est imprégné d’un tel personnage hors normes. « J’avais des souvenirs de lui de quand j’étais adolescent, à travers les médias et la télévision. On garde de lui l’image d’un vieux Monsieur à la barbe blanche, mais il a été jeune ! »
« J’ai fait de nombreuses recherches, lu beaucoup d’ouvrages le concernant. Il y avait de tout, il fallait me faire ma propre idée, poursuit Benjamin Lavernhe. On a rencontré des témoins qui l’ont bien connu, des membres de sa fondation, on a eu des confidences. On a eu accès aux archives de l’état aussi. J’ai été vraiment impressionné et j’ai eu une véritable affection pour l’homme et pas seulement le prédicateur ».
L’homme au-delà du tribun
Benjamin Lavernhe a aussi dû appréhender l’Abbé Pierre que le réalisateur a voulu porter à l’écran. « J’ai beaucoup parlé avec Frédéric du point de vue qu’il avait sur l’Abbé Pierre, de « son » Abbé Pierre. Il m’a touché et ça m’a aidé à mieux comprendre sa notoriété publique, par exemple. Quand il prenait la parole, il était en ébullition mais il était sincère. La souffrance des autres était son moteur.
Le film montre parfois l’Abbé Pierre en colère, notamment quand il rencontre le ministre français Maurice Lemaire après le décès d’un enfant abandonné. C’est aspect était moins connu : « ça traduisait l’intensité de sa douleur, explique alors le réalisateur. Quand on réalise une telle biographie, résumer près de cinquante ans de la vie de l’Abbé Pierre en 2 heures 15, c’est très difficile et forcément subjectif. Mais tous les témoignages que nous avons recoupés confirment qu’il lui arrivait de piquer une colère ».
Star des médias
L’Abbé Pierre était une star des médias mais jamais il ne s’est lancé en politique. « Il était un orateur qui touchait les cœurs et bouleversait les gens avec des mots simples qui cognent au cœur. Il éveillait les consciences en racontant des histoires terribles mais vraies. Il avait conscience de son talent d’orateur et il s’en servait. Mais il était toujours sincère ».
Le film de Frédéric Tellier s’attache aussi à montrer un personnage peu connu de l’entourage proche de l’Abbé Pierre, Lucie Coutaz, celle qui a partagé plus de trente de sa vie avec lui. C’est Emmanuelle Bercot qui l’interprète à l’écran. « On savait très peu de choses de cette femme qui a pourtant été très importante dans la vie de l’Abbé Pierre. J’avais juste une photo d’elle ainsi que le témoignage du dernier secrétaire de l’Abbé Pierre avant sa mort. Elle était modeste, discrète, réservée ».
Maquillage
Le film de Frédéric Tellier parcourt près de cinquante ans de la vie du saint homme, la prestation de Benjamin Lavernhe n’en est que plus exceptionnelle : « J’ai passé des heures dans la salle de maquillage, il y a eu neuf stades de vieillissement. Quand je sortais du maquillage et que je me regardais dans un miroir, j’étais vraiment impressionné et comprenait tout le sérieux et toute la responsabilité qui m’incombaient. Mais j’avais aussi une joie intense, un vrai plaisir de jouer, comme un gamin.
Sort-on différent d’un tel rôle ? « ça m’a aidé à voir le monde différemment » répond humblement Benjamin Lavernhe.
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