Après 'Apaisement' (2013), 'Gratitude' (éd. P.O.L). Charles Juliet publie un nouvel opus de son journal, et rien qu'avec ce titre il donne une idée du chemin parcouru. 'Il est vrai qu'écrire c'est nécessairement puiser dans son vécu, le quotidien, le circonstanciel, le particulier, un matériau pauvre et limité.' D'où vient qu'avec son écriture, précise et dépouillée, l'écrivain arrive si bien à nous rejoindre dans nos quêtes et nos doutes ?
Charles Juliet a le regard doux de ceux qui ont connu la souffrance. Il ne suffit pas de savoir que Charles Juliet a vécu un traumatisme à l'âge d'un mois - séparé de sa mère qui souffrait de grave dépression, il a gardé ce que le pédiatre et psychanalyste Donald Winnicott (1896-1971) a nommé 'l'agonie primitive'. 'Souvent ce trauma laisse de graves séquelles, et l'enfance continue par la suite à déterminer toute une vie.' Mais il faut lire ses livres pour comprendre quel a été le chemin parcouru. Cela fait 60 ans qu'il tient un journal. 'Quand j'ai commencé je ne savais rien de l'écriture, je ne savais pas vers quoi j'allais.' Il livrait toutefois un combat, celui de la quête de soi.
Il a derrière lui une carrière littéraire impressionnante, couronnée par le prix Goncourt de la poésie pour 'Moisson' (2013) et le grand prix de l’Académie française pour l’ensemble de son œuvre en 2017. Et cependant, Charles Juliet n'écrit pas pour produire mais 'pour parvenir à se connaître', ce qui est 'une longue aventure'. Car selon lui, rien n'est plus important que de se trouver soi-même. Et cela passe par l'écriture.
'Je n'écris que ce qui s'offre, ce qui vient, ce qui demande à s'exprimer.' À se libérer. 'Cette nécessité de se connaître je crois s'impose à toute personne dès l'instant qu'elle réfléchit un peu à ce qu'elle est et ce qu'elle veut être.' Pour Charles Juliet, il a fallu des année de recherche, de doute et de 'destruction' de lui-même et de ce qui l'empêchait de rejoindre celui qu'il était mais qu'il s'empêchait d'être.
'On a donc chacun je crois à s'engendrer.' Même s'il faut en passer par les larmes, parvenir à mieux se connaître c'est se donner de nouveaux horizons, un nouvel élan, un recommencement. Un engendrement. 'Beaucoup d'êtres souffrent mais en étant un peu coupés de leur intériorité, et il n'arrivent pas à saisir ce qui se passe en eux. Et parfois donc, une bonne lecture, les bons mots peuvent aider un être à se rejoindre, à pénétrer en lui-même et à mieux se comprendre.'
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