En deux décennies de règne, au lendemain de huit guerres de religion, Henri IV change de religion à six reprises, et redresse finalement le pays. Un homme, un séducteur, qui était de ceux "à se faire aimer par les pierres elles-mêmes". Qu’a-t-il apporté à la France ? Quel est son héritage actuel ? Réponse avec l’historien Jean-Christian Petitfils.
Lorsqu’Henri IV vient au monde, la France est beaucoup plus petite que l’Hexagone actuel. Elle est soumise aux invasions, par le Nord, par l’Est, et par le Sud-Est. La France est petite. Elle est morcelée. On compte 16 millions d’habitants. "C’est un pays qui va se retrouver en prise à des guerres de religion, qui sont aussi des guerres néo-féodales. L’Etat va se trouver fort affaibli par la dynastie des Valois. Il n’arrive pas à s’imposer. Il y a de grands personnages, des princes, des ducs, qui ont énormément d’ambitions territoriales et qui vont se servir de la division religieuse pour se constituer des clientèles" explique Jean-Christian Petitfils, historien des rois, auteur de "Henri IV" (éd. Perrin).
Tout cela va évidemment au détriment d’une unité nationale qui est en train de se faire. Henri IV vient de Navarre. Il s’agit d’un petit royaume indépendant qui a connu beaucoup de tragédies. Les 4/5 de la Navarre sont absorbés par l’Espagne. Il ne reste qu’une frange française qui ne souhaite que récupérer la partie espagnole. A côté de cela, il y a la vicomté de Béarn, qui appartient à la France, mais qui a des velléités d’indépendance. "Henri IV provient d’une dynastie périphérique" lance l’historien.
Ce dernier explique qu’Henri IV reçoit une très bonne éducation, il est élevé à la dure pour quelqu’un de son rang. Il acquiert une proximité avec le peuple. "Il est l’homme de la proximité, aimant parler avec les paysans. Ce qui va expliquer le mythe d’Henri IV, et la façon dont nous l’appréhendons lui-même" rappelle Jean-Christophe Petitfils. Côté religion, Henri de Navarre est baptisé catholique, mais il reçoit une éducation calviniste sous l’influence de sa mère. La séparation entre les deux religions se vit déjà dans sa propre famille.
Les massacres sur fond de religion entraînent la mort de 10.000 personnes à l’occasion de la Saint Barthélémy. C’est une vraie rupture. On somme Henri IV de se convertir. Il temporise. Il finit par le faire. "Il n’est pas vraiment protestant, ni vraiment catholique. C’est ce qui va faire sa force. Il croit en la messe et en la présence réelle. Il est hostile au culte des Saints, à l’existence du purgatoire" précise Jean-Christian Petitfils.
Henri IV accède au trône, et suite à l’échec du siège de Paris, et du siège de Rouen, finit par s’instruire pour se convertir. Suite à cette conversion, la reconquête du royaume en vue d’une réunification prend du temps, et de l’argent. "On est déjà dans le quoi qu’il en coûte. C’est le prix de la paix. C’est une nécessité politique. Henri IV le sait et n’hésite pas" lance l’historien. S’en suit l’édit de Nantes, un édit provisoire, qui fige la situation.
A partir d’Henri IV, la France se centralise. "Henri IV initie l’absolutisme royal qui va durer jusqu’en 1789" explique l’historien des rois de France. "La France a toujours été fragile. C’est un combat constant que doit mener le pouvoir central pour réconcilier. Je suis assez méfiant vis-à-vis de la décentralisation, qui peut créer de nouvelles féodalités" conclut-il. Ce qu’Henri IV a toujours tenté de combattre.
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