Les travaux dont cette chronique s’inspire ont été conduits conjointement avec : Pierrick Bruyas, Enseignant à Sciences Po Strasbourg, chercheur doctorant en droit de l’Union européenne à l’Université de Strasbourg et Caroline Perrin, Enseignante à l’EM Strasbourg, chercheuse doctorante en économie au laboratoire LaRGE, Université de Strasbourg, Consultante à la Banque Mondiale (Washington D.C.).
Aujourd’hui, j’avais envie de vous proposer de faire un petit pas de côté et de ne pas particulièrement parler de droit européen. De prendre un peu de hauteur si vous voulez. C’est pour bien commencer la rentrée ! Pourtant, finalement, je me rends compte que le sujet de recherche dont il allait être question s’insère particulièrement dans l’actualité.
Ce dont je vais vous parler, c’est d’un travail que nous sommes en train de conduire en ce moment avec une chercheuse en économie à l’Université de Strasbourg, Caroline Perrin, sur une question relativement transversale et que nous avons décidé de formuler, de façon un peu provocatrice, ainsi : « les femmes sont-elles de meilleures politiques que les hommes ? »
Je ne vais pas nécessairement rentrer dans le détail de tous les points que nous avons décidé de traiter au fond avec ma collègue, mais plutôt sur quelques points saillants qui vont de pair avec l’actualité et tout particulièrement avec l’élection du nouveau parlement italien un peu plus tôt cette semaine. Un parlement dont le nouveau parti majoritaire, le parti d’extrême droite « Fratelli d’Italia » est dirigé par une femme : Giorgia Meloni.
En premier lieu, nous nous sommes attelés à faire un tour d’horizon de la littérature scientifique, en particulier en sciences économiques, pour savoir quels étaient les traits caractéristiques qui avaient déjà été quantifiés lorsque des femmes exerçaient le pouvoir. Attention, c’est une tendance, ça ne veut pas dire que toutes les femmes politiques – ou même toutes les femmes – partagent ces caractéristiques. On a donc vu que les points suivants avaient déjà été mis en avant de façon statistiquement valable :
Ce tour d’horizon nous amène à notre deuxième point, puisque l’on s’est rendu compte que ce que je viens d’appeler des caractéristiques saillantes étaient parfois confondues avec des stéréotypes associés aux femmes. Cela peut revenir à entrainer un double effet pervers : d’une part les femmes sont assignées à leurs stéréotypes et y sont enfermées, bon gré, mal gré ; d’autre part, elles finissent parfois par instrumentaliser les stéréotypes féminins pour remporter des succès électoraux.
Je m’explique sur ce second point : on s’est rendu compte que certaines femmes profitaient des stéréotypes associés à leur genre (douceur, maternalisme, protection des plus faibles, etc.) pour pouvoir faire passer des messages sécuritaires ou nationalistes qui, s’ils étaient exprimés par des hommes, pourraient faire peur aux électeurs. C’est une analyse qu’on a souvent associée à Marine Le Pen ou Sarah Palin (États-Unis) par exemple. Cela semble également particulièrement adéquat pour expliquer en partie le succès de l’Italienne Giorgia Meloni. Il faut rappeler qu’elle s’est fait connaitre du public italien en scandant qu’elle était « une femme, une épouse, une mère ». En faisant cela, elle a embrassé, jusqu’au bout, tous les stéréotypes traditionnellement associés aux femmes pour porter un discours résolument antiféministe.
Bref, quand on dit que les stéréotypes ont la vie dure, j’ai envie d’ajouter également que les stéréotypes, parfois, nous mènent la vie dure !
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