Le journaliste et directeur de la rédaction du magazine Terre Sauvage, Éric de Kermel est écologiste depuis plus de 20 ans. Très engagé sur le lien entre spiritualité et écologie au sein du groupe Bayard, on lui doit aussi l'organisation, en 2015, du Sommet des consciences, à la demande de Nicolas Hulot et en préambule de la COP21. Au micro de Thierry Lyonnet, il raconte d'où lui vient son engagement et sa passion pour une écologie intégrale, à l'occasion de la parution de son "Abécédaire de l’écologie joyeuse" (éd. Bayard).
"Je suis né en Corse d'un père breton qui n'a jamais vécu en Bretagne et d'une mère provençale." Mais les nombreuses années qu'il a passées à l'étranger ont fait d'Éric de Kermel "un enfant du monde". Il aime notamment parler du Maroc, où il a passé son adolescence et où il retourne chaque année. "Il n'y a rien pour moi de plus émouvant que de vivre dans une oasis du sud marocain et de voir les hommes et les femmes qui sont dans ce lieu."
Du sud marocain, il aime la simplicité, le "rapport très humble à la nature", mais aussi le "respect" qui régit les relations avec les anciens... Un mode de vie proche de la sobriété heureuse, en somme, selon le concept cher à Pierre Rabhi. Et pourtant dans ces régions, la vie est dure : ce qui marque l'écologiste, c'est la joie qu'on y trouve. "Dans ces villages du Maroc que je connais et que je côtoie, le rire, la joie, les chants, sont bien plus présents que dans nos villages français. Il y a quelque chose de dur mais la joie est au rendez-vous."
Quel modèle voulons-nous suivre ? Cette simplicité qui séduit les Français au Maroc est précisément ce à quoi veulent échapper un certain nombre de Marocains, attirés par les villes et le mode de vie à l'occidentale. "On a laissé entendre et on a donné des images à voir, ou imposé finalement, comme critère d'une vie réussie, une vie qui passe par l'accumulation de biens matériels." Éric de Kermel confesse avoir cru lui-même, "jusqu'à l'âge de 30 ans", que s'il devait "prouver" à ses parents comme à lui-même qu'il avait réussi sa vie, il lui fallait "ces attributs matérialistes de réussite".
Quand, jeune professionnel, Éric de Kermel s'est installé en banlieue parisienne, il a été "sauvé" par des séjours chez son vieil oncle près de la vallée de la Clarée, dans les Hautes-Alpes. "Mon milieu, mon écosystème à moi, c'est la montagne." Il en a fait d'ailleurs le lieu de renaissance de son héroïne dans son roman "Mon coeur contre la terre" (éd. Eyrolles, 2019).
Ce qui a fait d'Éric de Kermel "un militant", c'est son arrivée à Terre Sauvage. Et ses voyages en France et à l'étranger pour "côtoyer des milieux naturel". Milieux dont il a découvert la profonde dégradation : "je l'ai vécue, je l'ai sentie". Que ce soit dans la rade de Toulon, où, enfant, il voyait des poissons et où il voit désormais des ordures, en Afrique avec la question des sacs plastiques ou en Amérique latine, où des territoires entiers sont "ratiboisés par l'exploitation forestière"... Son travail l'a conduit "aux avant-postes de la gravité de la question écologique". Et l'a poussé à "sortir de la neutralité du journaliste observateur pour s'engager et accepter des responsabilités en tant que militant".
Émission d'archive diffusée en février 2020
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