Alors que le nombre de détenus en avril 2017 a atteint le chiffre faramineux de 70. 230 personnes, il faut de toute urgence s'interroger sur la place et la fonction que peuvent remplir les religions en prison. Éclairages de la sociologue Mallory Schneuwly Purdie.
Depuis les années 90 on assiste à une demande religieuse pluirelle de la part de la population incarcérée. Catholiques, protestants, bouddhistes, témoins de Jéhovah, musulmans... On assiste à une grande variété de croyances et de pratiques religieuses, derrière les murs des prisons. Croyances te pratiques que les détenu mobilisent à des moments différents de leur incarcération, comme l'explique Mallory Schneuwly Purdie.
Après un mouvement de fond de sécularisation de la société française, le fait religieux émerge à nouveau. Et en prison, il a une fonction sociale. "Celui qui était un époux, un père de famille, un employé, un voisin, un coach de foot, qui avait un réseau social à l'extérieur, une fois qu'il passe le mur de la prison, devient simplement identifié par rapport à un crime." Ainsi, alors que la prison enlève "tout rôle social" à l'individu et qu'elle le "dépersonnalifie complètement", la religion fait partie de ces "appartenances", de ces traditions, que l'on peut prendre avec soi dans la cellule.
"La religion peut aider certains détenus à essayer de se reconstruire à partir de quelque chose de stable." Mallory Schneuwly Purdie admet que le fait religieux "peut aussi servir de thérapie". En favorisant la prière ou la méditation, la pratique religieuse encourage à "réfléchir, à se poser".
Les liens entre la prison et la religion ont en France une origine ancienne. Ultime réconfort dans l'Ancien Régime, puis composante majeure du traitement pénitentiaire, la présence religieuse vise à satisfaire l'exercice d'un droit reconnu aux personnes détenues. Et pose de nombreuses questions à l'administration pénitentiaire.
"La prison en tant qu'institution sociale vous dicte tous vos comportements." Horaires, nourriture... sont dictés par l'institution. Or, la religion, et notamment l'islam, devenue vraisemblablement la première religion carcérale, "peut vous permettre de casser cette temporalité". Mallory Schneuwly Purdie parle là de "stratégie carcérale" et d'"outil de contestation de l'autorité de la prison" pour "exister autrement que comme détenu".
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