Passer de l'avoir et de l'accumulation à la qualité de l'être. Pour qu'elle ne soit pas qu'un vœu pieu, la sobriété doit être vécue dans la joie.
En ce mercredi des Cendres, certains font le choix de quitter temporairement les réseaux sociaux. Pour le Carême, le mot d'ordre est en effet se débarrasser de ce qui entrave notre liberté intérieure. Pour cela, l'Église propose : la prière, le jeûne et le partage. Cette année, pour vous faire vivre le Carême, RCF a choisi le thème de la sobriété. Que nous soyons chrétiens ou non, la sobriété est ouverte à tous. Elle consiste à se priver non pas par haine subtile de soi-même et des autres, mais bien par amour de soi-même et des autres.
"La sobriété c'est le contraire de l'ébriété, qui est une situation d'excès voire de démesure, explique Patrick Viveret, donc la sobriété ce n'est pas le renoncement, le sacrifice, l'ascèse, c'est la question de la démesure qui est en cause." Selon le philosophe, on peut aussi bien parler de "frugalité heureuse".
Car la joie doit en effet accompagner la sobriété. "On ne peut être dans cette sobriété que si on est animé par la joie", admet Jean-Claude Noyé, qui anime réguièrement des sessions de jeûne. Or, souvent on associe la sobriété à la rigueur, à l'austérité et à la tristesse. C'est sans doute là où un changement de paradigme doit intervenir.
Produire et consommer toujours, et on sera heureux : ça c'est le refrain qu'on entend depuis de nombreuses années. Mais depuis quelques année, dans la société civile, et parmi les chrétiens notamment, on s'intéresse de plus en plus aux vertus de la sobriété. Notamment grâce aux ouvrages de Pierre Rabhi, à l'encyclique du pape François Laudato Si', ou encore aux Assises chrétiennes de l'écologie. En septembre dernier a également été lancé le Label Église verte.
N'y a-t-il pas cependant quelque chose de contre-intuitif à penser que moins égale plus? "On est très très sollicités vers l'accumulation et le fait de se remplir", comme le note Laura Morosini. Ce qu'en dit le pape François, qui a l'habitude de dénoncer le culte de l'argent, c'est que le besoin d'accumulation est le corollaire de la sècheresse des cœurs... Une fois qu'on a acheté, est-ce qu'on se sent mieux? A priori non!
On a beau savoir, globalement, que si on l'ensemble des humains consomment comme nous les Occidentaux, il faudrait trois ou cinq planètes ; les scientifiques et les associations ont parler de dérèglement climatique, d'atteinte à la biodiversité, de pollution dans les villes... si on veut changer de direction, "il faut une nécessité supérieure", soutient Patrick Viveret. "Et ça ne peut pas être simplement la nécessité et la logique de renoncement : c'est pour ça que les changements de posture qui font passer de la logique de l'avoir, de l'accumulation et de l'avidité, à la logique de la qualité, du développement dans l'ordre de l'être, sont essentiels."
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