"Meilleur parc du monde" en 2012 et 2014, "meilleur parc d'Europe" en 2013... On ne compte plus les récompenses attribuées au Puy du Fou. Le parc de loisirs qui a reçu 2.200.000 visiteurs l'an dernier fête ses 40 ans cette année : c'est moins de temps qu'il lui en a fallu pour devenir une référence internationale. Et pourtant, comme le raconte Philippe de Villiers dans son livre "Puy du Fou - Un rêve d'enfance" (éd. du Rocher), le pari n'était pas gagné d'avance. Par son thème, l'histoire, comme par son modèle économique, le Puy du Fou affichait dès sa création une ambition à contre-courant des parcs de loisirs classiques.
C'est le 16 juin 1978 que tout commence avec la première Cinéscénie. Plus tard il y aura le Grand Parc de l'Histoire de France, la Cité Nocturne... En 1977, Philippe de Villiers était encore élève à l'ENA mais déjà il avait en tête ce projet un peu fou de lieu de mémoire sous les traits d'un spectacle vivant. Attiré par l'originalité du nom, il bâtit son rêve sur les ruines d'un château Renaissance. Somme toute, il fallait être un peu fou pour se lancer dans un tel projet. "Toutes les conditions étaient réunies pour l'échec : pas de route, pas de soutien, pas de curriculum vitæ - parce que l'ENA c'est pas l'École nationale artistique ! raconte-t-il, pas de troupe, pas de technicien, pas d'argent, rien, j'avais rien mais j'avais ma plume. Et je me disais : vraiment si j'ai le frisson en écrivant, les spectateurs l'auront et je ferai venir le monde entier. Et c'est ce qui s'est passé."
Pourquoi s'est il lancé dans un tel projet ? "Le Puy du Fou fut pour moi un moyen désespéré, ultime, de retenir l'enfance", écrit Philippe de Villiers dans son livre. Est-ce de la nostalgie ? De la mélancolie ? On le devine poète quand il dit : "Chaque matin j'entendais qui montait à mes persiennes l'enclume, le chant du coq et l'angélus qui composaient une symphonie ; et j'étais un petit gars qui courait la campagne et qui cueillait sans le savoir des fleurs de civilisation." Un poète à la fois résistant et militant qui voulait raconter ce qu'était la Vendée "pastorale, processionnelle, triomphale, joyeuse".
Pour Philippe de Villiers, le Puy du Fou répond d'abord à un "devoir de gratitude pour une enfance heureuse" envers ses parents et ceux qui lui ont transmis sa culture. Ensuite "un devoir de réparation" - Philippe de Villiers ne parle pas de devoir de mémoire - "pour l'injustice faite aux Vendéens... 300.000 morts martyrs sans sépulture". Né en 2016, le spectacle "Le Dernier Panache", qui évoque l'épisode sanglant des guerres de Vendée, a reçu le prix de la "meilleure création mondiale" en 2017 et celui de la "meilleure création européenne" en 2016.
Dans les années 80, l'heure est plutôt aux parcs à thème inspirés des dessins animés, de la bande dessinée ou encore futuristes. En plus d'être tourné vers le passé, le Puy du Fou prend le contre-pied d'un certain modèle économique. "Pas de droits d'auteur pour le créateur, pas de subventions pour ne pas dépendre du marketing électoral, pas d'actionnaire pour ne pas dépendre de je ne sais quel brain-trust, pas de brevet extérieur, on fait tout nous-mêmes : cette indépendance artistique, technologique, pédagogique, économique, nous permet de choisir des thématiques qui n'ont rien à voir avec le commerce."
C'est que le Puy du Fou porte un projet sociétal pour ne pas dire politique, qui est de renouer avec nos racines. "J'ai senti au début des années 80 que nous allions vers un nouveau monde terrible, un monde nomade, désaffilié, désinstitué, déraciné." En faisant le pari que le grand public se passionnerait pour l'histoire, Philippe de Villiers voulait apporter "une réponse au mémoricide français". "On vit coupé de notre propre histoire, on est le seul peuple à vivre comme ça et ça va se terminer mal si on continue."
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