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Naissance, vie et mort du nazisme

RCF, le 4 février 2019 - Modifié le 9 décembre 2024

Le 8-mai 2024 marque les 79 ans de la victoire des Alliés sur l'Allemagne nazie et donc la fin de la Seconde guerre mondiale. À cette occasion, et alors que les mots "populisme", "fascisme", "nazisme" reviennent en force, Frédéric Sallée retrace la naissance, la vie et la mort du nazisme.

Wikimédia Commons - Nuremberg 1937Wikimédia Commons - Nuremberg 1937

Ce qui reste dans les mémoires comme le symbole absolu du mal et de l'horreur, le nazisme, a été l'objet d'innombrables travaux historiques. Rien qu'en Allemagne, on recense pas moins de 36.000 ouvrages sur le seul sujet. Le nazisme a fait naître de nouveaux questionnements sociologiques, philosophiques ou religieux sur ce qu'est l'homme et de quoi il est capable : mais aura-t-on jamais fini de comprendre comment cela a été possible ? 100 après l'apparition des thèses nazies, se multiplient aujourd'hui dans l'espace public les références au nazisme, au fascisme et à la montée des populismes, semant le plus souvent la confusion entre les termes et propageant des théories erronées. Dans son ouvrage "Anatomie du nazisme" (éd. Le Cavalier Bleu), l'historien Frédéric Sallée revient de façon salutaire aux racines du phénomène.
 

"Le nazisme c'est une lame de fond, c'est un mouvement politique du ressentiment"

 

Quelques idées reçues sur le nazisme

On a beaucoup entendu dire que le nazisme est né en réaction au bolchevisme. Rappelons que lorsque l'on s'est emparé du sujet dans l'immédiat après-guerre, on était déjà dans un contexte de guerre froide. Après 1945 on a donc pensé le nazisme "en tant qu'objet d'histoire de guerre froide". "En faisant du nazisme une réaction, on oublie le substrat premier qu'est l'antisémitisme dans la pensée nazie, explique Frédéric Sallée, c'est l'épine dorsale du nazisme et c'est à partir de cette épine dorsale que vont s'agréger des thèmes annexes comme l'anti-communisme. Avant d'être anti-communisite le nazi est antisémite." Le système de pensée nazie est une vision du moinde qui "s'articule autour de l'antisémitisme".

Le nazisme est-il le prolongement du fascisme italien ? Le fascisme peut représenter "une source d'inspiration" mais on ne peut pas parler de "filiation directe". "Il n'y a qu'à voir les premiers discours, les premiers écrits d'Hitler, pour voir qu'il y a une pensée propre à l'Allemagne." Ce qui les distingue : l'antisémitisme, qui n'est pas la clé de voûte de l'idéologie fasciste mais plus une idée parmi d'autres, au sein de ce système de pensée.

 



 

Aux origines du nazisme : la Première guerre mondiale...

On peut considérer que le nazisme émerge en 1919, avec la structuration du mouvement politique au mois de février. 1919, c'est l'année de l'entrée en scène d'Adolf Hitler après sa rencontre avec Anton Drexler (1884-1942) l'un des fondateurs du Parti ouvrier allemand (Deutsche Arbeiterpartei ou DAP). Et au cours de l'été 1920 naît officiellement le NSDAP, ou Parti national-socialiste des travailleurs allemands : le parti nazi.

Très nettement, le nazisme est né d'un "contexte guerrier", l'historien parle de "matrice guerrière". La Première Guerre mondiale est en effet le terreau dans lequel le nazisme s'est enraciné : une rancœur, une haine viscérale, entretenue et amplifiée par le mouvement nazi. "Le nazisme c'est une lame de fond, c'est un mouvement politique du ressentiment." Si l'Allemagne a échoué alors qu'elle était "supérieure militairement et stratégiquement", c'est, croit-on, la faute d'un ennemi de l'intérieur : seront aussitôt désignés comme boucs-émissaires, les juifs. Le nazisme nourrit également une haine de la démocratie libérale occidentale.

En 1919, la guerre est finie mais l'Allemagne n'en a pas terminé avec la violence, et notamment les révoltes spartakistes. L'historien américain George L. Mosse (1918-1999) est à l'origine du concept de "brutalisation des sociétés". Il est l'auteur en 1990 d'un essai, "De la Grande Guerre au totalitarisme : La brutalisation des sociétés européennes" (éd. Hachette littératures, 1999), où il montre comment les Allemands qui ont combattu sur le front se sont nourris de cette violence pendant la Première Guerre mondiale. "On va pouvoir retrouver des phénomènes de comparaison entre violence physique vécue et la violence intellectuelle et morale du nazisme."

 ... ET LA CRISE DE 1929

Marginal durant les années 20, le NSDAP a fait une ascension électorale fulgurante dès 1930. La crise économique de 1929 a indubitablement joué le rôle d'"accélérateur " dans l'expansion du nazisme. En 1932, l'Allemagne compte en effet 6 millions de chômeurs. Mais la crise de 29 n'est pas la seule raison : Hitler a su récupérer les voix d'un parti d'extrême droite alors en plein effritement, le Parti populaire national allemand ou DNVP, dirigé par Alfred Hugenberg.

L'avènement du nazisme était-il inéluctable ? Dans les années 80, une école de pensée soulignait les spécificités allemandes et laissait croire à un destin inéluctable de l'Allemagne. Certes, Hitler a puisé dans un vieux fond anti-judaïque, certes il a voulu élaborer un IIIe Reich dans la continuité de l'Empire allemand (1871-1918), lui-même héritier du Saint-Empire romain germanique (962-1806). Aujourd'hui ces théories sont abandonnées au profit d'une vision plus large, qui comprend une analyse des contextes nationaux et internationaux. Et aussi les particularités liées à la personnalité d'Hitler.

 

 

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