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Pour qui la Palme d’Or ? Pas de véritable favori qui sorte du lot

Un article rédigé par Pierre Germay - RCF Liège, le 28 mai 2022 - Modifié le 9 janvier 2024

A quelques heures de la fin du Festival, ce samedi à 20 heures 30 (en direct sur France 2), risquons nous au jeu des pronostics tandis qu’aucun favori ne se démarque vraiment.

Affiche officielle de la 75e édition du Festival de CannesAffiche officielle de la 75e édition du Festival de Cannes

Dans Le Film Français distribué quotidiennement durant le Festival, des critiques cinémas sont appelés à coter les films de la compétition. A ce petit jeu, les critiques français font de « Frère et sœur » d’Arnaud Desplechin leur favori à la Palme d’Or : voilà un chauvinisme qui n’étonnera personne !

 

Par contre, on partagera plus volontiers leur choix de voir figurer en bonne place au palmarès « Les Amandiers » de Valéria Bruni-Tedeschi avec sa plongée dans les coulisses de la création théâtrale, coulisses dans lesquelles bon nombre de jurés se seront peut-être retrouvés.

 

Si l’on quitte le cinéma hexagonal, « La femme de Tchaïkosvski » du réalisateur russe exilé, Killir Serebrennikov, et « R.M.N. » du Roumain Cristian Mungiu ont la cote. C’est que les deux films collent avec une certaine actualité, le premier quand il s’en prend à une icône de l’imagerie du pouvoir moscovite et le second quand il dénonce l’intolérance et un racisme larvé qui gangrènent toujours nos sociétés occidentales.

 

En signant leur film le plus épuré de leur carrière avec « Tori et Lokita », Luc et Jean-Pierre Dardenne ont enthousiasmé la critique avec leur dénonciation de la violence et des difficultés rencontrées par des migrants parfois encore enfant. Qui sait si une historique troisième palme d’or ne les attend pas ?

 

A moins qu’à l’instar de Julia Ducournau l’an passé avec « Titane », David Cronenberg ne décroche la timbale avec ses « Crimes du futur » et sa vision futuriste et obsessionnelle de la transformation des corps.

 

Dans les films projetés ces deux derniers jours du Festival, on retiendra encore  « Close » du Belge Lukas Dhont qui a laissé une très belle impression, donnant à espérer peut-être un prix d’interprétation pour Eden Dambrine, un des deux garçons du film. Mais aussi « Leila’s Brothers » de l’Iranien Saeed Roustayi, le portait d’une famille iranienne perdue entre traditions, modernité et coups de grisou, offrant à son actrice principale, Taraneh Alidoosti, l’opportunité de souligner le rôle que la femme joue aujourd’hui dans cette société où pourtant seul l’homme semble décider de tout.

 

Mais la bombe de cette fin de Festival, c’est assurément  « Pacifiction », une production franco-espagnole signée du réalisateur Albert Serra. Deux heures quarante-cinq durant, le spectateur est baladé dans la moiteur de Haïti sur les pas d’un haut-commissaire du gouvernement français en costard blanc (Benoît Magimel), entre rumeurs de reprise des essais nucléaires, scooter des mers sur fond de vagues-rouleaux d’un bleu paradisiaque, discothèque à l’ambiance décadente, femmes dansant les seins nus, et saouleries jusqu’au comas éthylique…

 

Certains (qui auraient reçu l’indispensable décodeur à cet interminable mascarade ?) y verraient la description de la fin d’un monde où tout se déglingue, d’un monde post-colonial pourri par la vacuité du discours politique, d’un monde au bord du gouffre… Bref, un chef d’œuvre, une palme d’or indiscutable ! Sauve qui peut !

 

Pour le prix d’interprétation masculine, si l’un ou l’autre gamin, des Dardenne, de Lukas Dhont ou de « Armaggedon Time » de James Gray, pourrait créer la surprise, Saeed Poursamimi, le patriarche de la famille iranienne de Saeed Roustayi, ou Tarfeek Barhom, l’étudiant de l’université islamique de « Boy From Heaven » de l’Egyptien Tarik Saleh seraient un très bon choix.

 

Côté du prix d’interprétation féminine, Aliona Mikhaïlova qui campe magnifiquement « La femme de Tchaïkovski », ou Nadia Tereszkiewicz, la jeune comédienne des « Amandiers » de Valeria Bruni-Tedeschi. ou encore l’actrice sud-coréenne Tang Wei pour son rôle de manipulatrice vénéneuse dans le film de Park Chan-Wook, « Decision to Leave » feraient honneur au palmarès.

 

A moins, diront les plus ironiques, qu’un prix d’interprétation animalier ne soit créé pour l’âne de Jerzy Skolimowski dans « EO, Hi-Han », un film gag mais peut-être pas tant que ça, qui à travers le regard d’un âne balloté un peu partout suite à l’interdiction faite aux cirques d’avoir des animaux en cage, dépeint notre société avec humour et perfidie.

 

Au Festival de Cannes, Pierre Germay.

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