On parle bien de croissance économique. La croissance économique, c'est la variation de la production de biens et de services dans une économie. Plus on consomme, plus la croissance est forte. En focalisant sur la croissance économique, on rentre dans un mécanisme pervers qui provoque une prédation sur les ressources terrestres. La croissance infinie est impossible.
Par ailleurs, l'indicateur de la croissance, c'est le PIB, et c'est cet indicateur qui permet de classer les pays en fonction de leur niveau de "développement". C'est totalement absurde. On évalue le niveau de développement d'un pays en fonction de sa capacité à dépenser et pas en fonction du bonheur des personnes. Le développement devrait s'évaluer en fonction par exemple du temps que vous passez à jouer avec vos enfants, de la façon dont on traite les aînés, du taux de mortalité infantile, du nombre de minutes que vous passez chaque année à admirer les étoiles ou du nombre d'instruments de musique que vous savez jouer.
Alors évidemment, quand le pape François se fait le défenseur de la décroissance, je n'y vois pas autre chose que la mise à jour de la doctrine sociale de l’Église. Je n'y vois pas autre chose que la retranscription de ce passage du sermon sur la montagne, dans l'Evangile de Matthieu : "Ne vous faites pas de trésors sur la terre, là où les mites et les vers les dévorent, où les voleurs percent les murs pour voler. Mais faites-vous des trésors dans le ciel, là où il n’y a pas de mites ni de vers qui dévorent, pas de voleurs qui percent les murs pour voler." Ou encore: "Nul ne peut servir deux maîtres: ou bien il haïra l’un et aimera l’autre, ou bien il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l’Argent."
Cela signifie-t-il que les écrits du pape François n'auraient rien d'extraordinaire? Oui et non. Dans le fond, il n'y a en effet rien de révolutionnaire. Mais sur la forme, en employant le terme de "décroissance", il ouvert les yeux de beaucoup de chrétiens et chrétiennes, il a ouvert un dialogue avec la sphère non-chrétienne de l'écologie. Les marches climat, comme celles d'hier, n'auraient pas eu la même ampleur sans Laudato Si, car ce texte a décomplexé beaucoup de croyants qui se sont sentis légitimes à rejoindre ces marches. Et puis, surtout, je crois que Laudato Si a permis de redonner du sens et de l'Espérance dans le combat écologique. Il ne s'agit pas simplement de renoncer à une croissance économique et à un modèle économique, il s'agit de retrouver du lien humain, de la solidarité et de la joie de vivre universelle.
Jeunes de la "génération climat", Alexandre Poidatz et Stacy Algrain livrent en alternance, chaque semaine, leur regard sur l'écologie et leurs clés pour changer le monde.
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