Pascal Greboval du magazine Kaizen apporte son éclairage sur les migrations climatiques et les politiques.
Avec le dérèglement climatique, des organismes comme la banque mondiale envisagent d'importants déplacements de population. Leur dernier rapport estime que d’ici 2050, 220 millions de personnes à travers le monde pourraient potentiellement devoir quitter leur région à cause de la sécheresse, des pluies diluviennes, de l’élévation du niveau de la mer, etc. Mais ce ne sont là que des projections, difficiles de savoir si ces chiffres seront justes, de savoir vers quelle destination les personnes concernées se dirigeront, si elles resteront dans leur pays, leur continent. Je pourrai ajouter aussi que ces réfugiés climatiques seront les victimes de notre mode de vie et qu’il serait « normal » de les accueillir. En effet, ce sont essentiellement les pays qui émettent le moins de GES qui seront les plus touchés comme l’Afrique subsaharienne ou l’Asie de l’Est qui ne sont pour rien dans le dérèglement climatique. Ces populations rejetant en moyenne 10 fois moins de CO2 qu’un Français. Mais comme vous m’avez tendu la perche sur l’angle climatique je vais rester sur le même champ sémantique et évoquer l’adaptation.
Depuis cet été, on ne parle plus d’atténuation du dérèglement climatique mais d’adaptation. Traduction, il est trop tard, on ne peut plus rien faire, nous allons devoir faire avec. Je pense que nous devons accueillir le phénomène migratoire avec la même réflexion, c’est-à-dire ne plus lutter. Comme le dit François Gemenne « Les flux migratoires sont comme le jour et la nuit : on peut éclairer les rues tant qu’on veut avec des projecteurs, on n’empêchera pas la nuit de succéder au jour. Idem, on peut mettre tous les barbelés et les garde-frontières du monde, l’immigration continuera d’exister ». Ce spécialiste de géopolitique et membre du GIEC tout comme d’autres, militent pour l’ouverture des frontières.
D’ailleurs toutes les recherches sont unanimes et vont dans leur sens pour affirmer qu’il n’y aurait pas d’appel d’air. C’est un mythe ! Les conditions d’accueil et des aides sociales ne déterminent absolument pas le pays de destination pour un migrant : personne ne vient à Calais parce qu’on y installe des douches. C’est une décision extrêmement difficile de migrer, ça implique de quitter sa famille, c’est un investissement qui coûte très cher. Au contraire même cela rendrait les migrations beaucoup plus organisées et tuerait le commerce des passeurs. Ce que m’a confirmé un jour un préfet mais qui ne souhaitait pas le dire publiquement.
Ce qui est certain c’est qu’historiquement, migrant était un terme connoté très positivement : les migrants étaient des aventuriers, ceux qui avaient le courage de partir et de chercher une vie meilleure. Prenons l’exemple des états unis. Pour le meilleur ou le pire, ce pays, devenu la première puissance mondiale, est le fruit de la migration d’européens. À l’aube d’un nouveau monde à inventer, peut-être est-il sage de se souvenir que les migrants peuvent apporter aussi des solutions.
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