Jeudi 25 novembre, c’est la Journée internationale contre les violences faites aux femmes, instituée par l’ONU. Un jour de triste mémoire : le 25 novembre 1999 en effet, le dictateur Trujillo, qui règne alors en République dominicaine, fait sauvagement assassiner les trois soeurs Mirabal, militantes des droits humains.
On ne peut l’oublier : dans notre pays, tous les deux jours et demi, une femme meurt sous les coups de son partenaire. En 2020, 102 femmes ont été tuées. Elles étaient 146 en 2019. Beaucoup d’autres sont quotidiennement victimes de toutes sortes de violences : psychologiques, économiques, spirituelles, sexuelles. Ainsi un mari, un concubin va tout mettre en place pour rabaisser sa partenaire, l’enfermant peu à peu dans une prison dont elle ne parvient pas à sortir. Elle doit quémander de l’argent, est isolée de ses proches, est contrôlée via son téléphone portable. Résultat : elle perd un peu plus chaque jour confiance en elle, au point de se convaincre qu’elle est la seule responsable de sa situation.
Ce cycle de la violence dans le couple est désormais bien connu. Après des débuts idylliques s’installe un climat de tension. L'inquiétude devient le quotidien de la victime : de quelle humeur va-t-il être ce soir ? La victime développe une hypervigilance. Puis vient la crise et son lot d’agressions psychologiques, physiques, sexuelles.
Ensuite, l’agresseur entre dans une troisième phase: celle de l’autojustification. C’est transfert de responsabilités sur le mode “c’est ta faute, tu me pousses à bout”. La phase suivante est celle de la rémission amoureuse : l’homme couvre sa partenaire de cadeaux. Mais le répit est de courte durée. Le cycle recommence avec en général une montée de la violence physique. Et tout ceci loin des yeux de la société tant l’agresseur se montre souvent charmant à l’extérieur et tout à fait fiable. Quand la femme est prête à partir, le danger de mort est imminent…
Tout d’abord s’informer. Face à ce fléau, les prises de conscience progressent. Des formations se mettent en place pour l’accueil des victimes dans les commissariats et les gendarmeries. Celles qu’on ne voulait ni entendre, ni croire prennent un peu plus la parole. Des études montrent les conséquences sur les enfants, tant psychologiques que scolaires. L’éloignement des agresseurs, notamment via l’utilisation des bracelets électroniques, des téléphones d’alerte sont fournis aux victimes, encore timidement.
De plus en plus d’associations, de mairies, de paroisses proposent des débats ou des formations. Car, il faut le savoir, les violences conjugales touchent tous les milieux, toutes les tranches d’âge et démarrent souvent dès la première relation amoureuse.
L’association à laquelle j’appartiens, Une place pour Elles, travaille pour que le sujet devienne public, qu’il sorte de la sphère privée. Qu’une femme (mais ce peut être dans une moindre mesure un homme) soit agressée par son partenaire devienne intolérable, insupportable. Une place pour Elles invite à poser un acte symbolique : matérialiser la place de la femme qui n’est plus là, au travers d’une chaise vide, dans un lieu de passage, pour marquer les esprits. Parce que ces femmes nous manquent.
Nathalie Leenhardt est journaliste, ancienne rédactrice en chef du magazine Réforme. Chaque semaine, écoutez son édito dans La Matinale RCF.
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