Bonjour à tous en ce dimanche de la Sainte Famille.
Les lectures de ce jour nous plongent dans des histoires de familles !
Des histoires qui se confondent avec les nôtres toujours appelées à la confiance et à la foi ; une histoire de progéniture qui se transforme en histoire de vie; une histoire d’héritage qui se transforme en l’histoire de confiance. Peut-être pouvons-nous nous interroger : quel héritage laisserons-nous à nos enfants, à ceux qui viendront après nous ? Un héritage de vie, ou de désarroi et de mort ? Histoire de confiance et de foi, ou histoire de fermeture sur soi ! A nous de veiller à laisser à nos enfants un héritage digne des histoires de nos familles, des histoires de vie ! GN 15,1-6 ;21,1-3 ; Psaume 104, He,11.8.11-12.17-19 ; Lc2,22-40
Le chapitre 15 du Livre de la Genèse est celui où est affirmée pour la première fois, la foi d’Abraham. Et cela se passe au cours d’une vision. Une vision où un rêve, toujours est-il que la parole de Dieu atteint le cœur d’Abraham. D’abord pour le rassurer comme si le Seigneur anticipait les arguments d’Abraham qui se fait vieux et qui craint de mourir sans enfant.
Ne crains pas ! Tous les prophètes sont dans la crainte lorsque le Seigneur s’adresse à eux.
Crainte d’une mission trop lourde, crainte de ne pas être à la hauteur, crainte d’être emmené là où nous ne choisisserions pas d’aller ;
Je suis un bouclier, Ta récompense sera très grande, ajoute le Seigneur. Abraham a déjà tout quitté sur une simple parole de Dieu, mais cette fois, Abram répond « Mon Seigneur, que me donneras-tu ? Je m’en vais sans enfant… »
Sa réponse trahit son inquiétude, en recentrant tout sur la véritable question, son absence de descendance.
Ce qui peut nous frapper c’est qu’Abram reconnaît immédiatement celui qui lui parle, c’est bien celui qui le protège, celui qui lui a promis une terre, une descendance et maintenant une récompense. Cependant, pour la première fois, nous percevons son découragement. Que pourrais-tu me donner qui soit une récompense puisque je suis condamné à finir ma vie sans héritier. Sincèrement l’attente devient bien longue ! Abram est dans l’obscurité de la foi, marquée par la stérilité de la vie.
Alors, il imagine une solution tout à fait conforme aux coutumes de l’époque, instituer son serviteur comme héritier afin qu’il prenne soin d’Abram et de sa femme et qu’il s’occupe des funérailles. Avoir une descendance c’est aussi laisser une trace après le passage sur terre. Remarquons qu’Abram s’adresse en Tu au Seigneur « Tu ne m’as pas… » plutôt que de dire « Saraï » ne m’a pas donné ». Abram attend bien cet héritier de Dieu .
Le Seigneur répond : « Celui -là ne sera pas ton héritier mais bien quelqu’un issu de ton sang. » Fidèle à sa Promesse, le Seigneur réaffirme pour la quatrième fois, mais d’une façon plus précise, que le grand peuple dont il a parlé au chapitre 12 passe par le sang d’Abram.
Donc, pas par son neveu Lot ni par son serviteur. Mais alors comment ?
Malgré cette incertitude, « Abram crut et le Seigneur le lui compta comme justice. »
Premier texte biblique qui parle de la foi ! (12, 4, Abram partit).
Saint Paul le reprend dans sa lettre aux Hébreux que nous lisons aujourd’hui.
« avoir foi, croire » être solide, ferme, fiable, stable. Engagement de l’être tout entier qui a confiance en quelqu’un.
Abram est centré dans la confiance malgré que la Promesse ne soit pas accomplie et de plus en plus aléatoire vu son âge avancé !
Abram accepte que le Seigneur puisse faire l’impossible. De l’inquiétude il passe à la foi et cela lui est compté comme justice. Aux yeux de Dieu il a fait ce qu’il attendait de lui. Il se maintient solidement et est donc promis à une grande postérité. ( Comparée aux étoiles, rappel que le Seigneur est créateur du ciel et de la terre cfr. 13,16). Abraham s’est totalement abandonné au Seigneur et la promesse de fécondité peut alors se réaliser et se prolonger jusqu’à nous.
Nous tous qui sommes les descendants du Père des croyants nous sommes aussi invités à faire confiance, à oser croire que le Seigneur puisse réaliser l’impossible dans chacune de nos vies.
Mais pas nécessairement l’impossible que nous attendons. Un impossible qui se transforme en un chemin de vie tournée vers l’espérance et vers la joie .
Car Sarah dans sa vieillesse enfanta un fils pour Abraham, il l’appela Isaac ce qui veut dire : « L’enfant du rire ! ».
Réjouissons nous !!!
Saint Luc dans son récit nous fait passer sans transition d’un environnement d’une simplicité inouïe, un nouveau-né déposé dans une mangeoire, entouré de ses parents privés d’hôtellerie et de quelques bergers, les individus parmi les plus pauvres d’Israël.
Bien sûr, Luc mentionne la présence des anges qui ne cessent de faire le lien entre la Sainte famille et le groupe des bergers avec leurs troupeaux. Entre le ciel et la terre, entre le divin créateur et la petitesse d’un enfant déposé au cœur de nos existences.
Et quelques versets plus loin, nous voilà transporté au Temple de Jérusalem. Le cadre est posé, la Sainte Famille est membre de la communauté d’Israël définie par son observance de la loi de Moïse, par le Temple et la prophétie. Respectant la Loi et plus précisément les prescriptions du Livre du Lévitique, 40 jours après la naissance d’un garçon a lieu le rite de purification de la nouvelle accouchée. Il est prévu qu’elle amène au prête un agneau âgé d’un an, si elle ne peut se procurer un agneau, elle prend deux tourterelles ou deux pigeons. (Lv 12,6-8).
Marie et Joseph se rendent donc à Jérusalem pour accomplir ce rite. Mais ce n’est là qu’une partie de la cérémonie relatée par l’évangéliste. Il fait aussi mention du rite du rachat du premier- né. Au moment de la sortie d’Égypte Dieu avait demandé à Moïse de lui consacrer tout premier- né ouvrant le sein maternel. (Ex 13,1-2). Un prix de 5 sicles avait été fixé. C’était le père de l’enfant, qui d’ordinaire, se chargeait d’observer ce précepte rappelant la vie accordée par Dieu aux premiers-nés d’Israël tandis que ceux d’Égypte étaient frappés de mort. (Ex 12,29-33)
Le premier-né consacré à Dieu revêt aussi la belle symbolique d’un abandon de notre futur dans les mains du Seigneur. En effet le premier né d’un troupeau est la promesse de tous ceux qui vont suivre. Le troupeau c’est la richesse d’une famille, d’un clan, d’une tribu. En consacrant le premier- né de la famille à Dieu c’est lui offrir le futur, l’avenir de cette famille. C’est le signe d’une confiance totale comme celle d’Abraham qui par sa foi est devenu père d’une descendance aussi nombreuse que les étoiles du ciel et que le sable au bord de la mer, une multitude innombrable.
Sommes-nous prêts en ce temps de Noël où le Seigneur nous fait le don inouï de son Fils, sommes-nous prêts à entrer dans une sorte de réciprocité. Et à lui offrir l’incertitude de notre futur, le flou de nos projets, l’ébranlement de nos certitudes ? Sommes-nous prêts à entrer dans la confiance ?
Une fois les rites accomplis selon la Loi, Saint Luc s’attarde un peu dans le Temple. Moment d’une grande intensité car après avoir entonné avec la cour céleste « Il est né le divin enfant » il s’agit maintenant de laisser la place à Israël pour qu’il puisse reconnaitre après les bergers, celui qui lui est donné comme sauveur. Pour reconnaître en cet enfant de pauvres « la consolation d’Israël ». Survient alors le double témoignage prophétique de Syméon et d’Anne. Et cette reconnaissance ne se déroule plus en pleine campagne, mais au Temple, là où bat le cœur d’Israël en présence de son Dieu. En accueillant le petit enfant dans ses bras, Syméon héritier des prophètes et rempli d’Esprit saint reçoit dans son cœur l’accomplissement de la promesse faite à ses pères. Mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples. Lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël ». Cet homme juste et religieux, dont le prénom veut dire « celui qui écoute, qui obéit » Syméon qui a veillé toute sa vie, accueille sans résister, sans argumenter, l’inattendu de la présence du Seigneur dans ce petit paquet de chair anonyme, fragile et minuscule.
Et sa parole annonce à la fois la lumière et l’ombre. Lumière des nations et signe de contradiction. La présence du Christ dans notre humanité divisera son peuple, Israël et cette déchirure aura les conséquences dramatiques que nous connaissons dans l’histoire juive.
Cette présence vient aussi diviser nos sociétés, nos familles, nos vies personnelles.
Oui nos désirs de vérité, notre quête de lumière viennent se heurter à nos résistances intérieures, nos compromis, nos difficultés à pardonner, à nous réconcilier. Oui le regard du Christ révèle la beauté du monde et l’exigence qu’il y a si nous voulons préserver cette beauté. Cette fragile beauté du cosmos, des êtres qui le peuple et aussi la beauté parfois cachée de ce que nous sommes chacun.
Et Marie sera le signe de cette déchirure. Elle qui dans un Oui d’une confiance totale en son Dieu a entendu cette promesse « Il sera Fils du Très Haut ». Elle suivra son enfant sur le chemin lumineux et douloureux de la Croix.
Cette contradiction dont le Christ est le signe préfigure le destin de tous ceux qui avec Marie, accueilleront la Parole et la conserveront dans leur cœur.
Mais de cette déchirure surgira un nouvel enfantement dont nous sommes, nous, lecteurs d’aujourd’hui, les fruits. A nous de les faire grandir et de les partager pour qu’advienne simplement là où nous nous trouvons ce Royaume de paix et de fraternité annoncé.
Quant à la prophétesse Anne, veuve de 84 ans dévouée au service du Temple dans le jeûne et la prière, c’est elle aussi une veilleuse dont le cœur reconnait dans la joie et la louange la parole de Dieu incarnée dans ce petit enfant.
Puissions-nous en ces temps troublés rester suffisamment éveillées afin de reconnaitre la présence lumineuse du Christ là où nous ne l’aurions peut-être jamais imaginée !
Le Seigneur nous surprendra toujours !
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