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Gérard Testard : "Dieu ne reprend pas ses dons"

Un article rédigé par Yves Thibaut - 1RCF Belgique, le 8 mars 2024 - Modifié le 12 mars 2024
16/17Gérard Testard :"Dieu ne reprend pas ses dons"

Engagé depuis ses 30 ans dans la gouvernance d'associations chrétiennes, Gérard Testard livre son témoignage de croyant dans son nouveau livre "Dieu ne reprend pas ses dons". Il y analyse aussi la crise de gouvernance survenue dans les Fondations pour un monde nouveau, devenue Fondacio.

(C) Gérard Testard(C) Gérard Testard

Gérard Testard, vous avez rejoint la permanence d’une communauté nouvelle depuis vos 30 ans. Dans quel état d’esprit étiez-vous au moment de votre conversion ? 

 

A l'âge de 30 ans, j'ai vécu une expérience spirituelle de rencontre avec Jésus Christ qui m'a fait dire “si c'est ça Dieu, alors il ne faut pas donner un peu ; il faut tout donner” ! J'ai pris des engagements dans plusieurs domaines. Malgré cette ascension sociale, l'expérience était si forte, j'ai donné ma vie à Dieu. Une communauté savait que j'étais libre et m'a fait appel ; je me suis engagé comme ça, avec une situation professionnelle, tout en étant dans un chemin vocationnel.

Le renouveau charismatique catholique a commencé aux Etats-Unis dans les années 60, et beaucoup de personnes allaient là-bas se ressourcer, ont été très touchées, et ont reçu l'effusion de l'esprit. Certains ont créé des groupes de prière et puis petit à petit, ils ont désiré aller plus loin, ils ont créé des communautés (des communautés de vie, des communautés d'alliances) ; mais il y a eu une grande vague et je crois que c'était un don de Dieu, comme l'avait dit Paul VI à Rome.

Dans les années 70, il y a eu une grande crise avec le départ de prêtres et la baisse des vocations. S'agissant des Fondations du monde nouveau, les jeunes désiraient se construire ; il fallait donc un gros investissement sur la formation humaine. C'était à ce moment-là assez prophétique, des jeunes qui donnaient leur vie à Dieu, qui se construisaient humainement, il y avait un grand besoin de savoir qui on est et où on va. 

Comment réagissez-vous aujourd'hui face à l'ampleur des révélations, pas seulement dans le mouvement Fondacio que vous, évidemment, vous connaissez très bien de l'intérieur, mais face aux nombreuses communautés nouvelles chrétiennes concernées par des abus mis en lumière ?

 

En 1991, la communauté Fondation pour un monde nouveau a connu une crise majeure de gouvernance. Les deux années qui ont précédé la crise, j'étais en conflit plus ou moins ouvert, mais j'étais dans un état d'esprit très enthousiaste, désireux de comprendre toute cette manière d'accueillir les dons de Dieu, qui étaient nombreux.

Chez Fondacio (auparavant Fondation pour un monde nouveau), il y avait un grand élan du cœur, un élan pour répondre à l'appel de Dieu. Mon accompagnateur spirituel nous disait toujours qu’une communauté se fonde sur trois générations. On peut dire qu’une personne “initie” un mouvement, mais cela ne fait pas d’elle un fondateur pour autant. 

Le problème c'est que les fondateurs, soit ils se mettent trop au centre, soit ils ne partent pas assez vite. Il faut accueillir les choses. Si le mouvement ne s'institutionnalise pas suffisamment, le système reste fusionnel. Le fondateur n'a pas à s'identifier à l'œuvre qui l'a accomplie, à travers son charisme. A un moment, il y a des crises qui éclatent. Cette forme d'absolutisation peut mener à tous les excès, comme le cléricalisme ou des abus de conscience, des abus spirituels ou sexuels. Il y a des communautés qui ont bien intégré tous les éléments d'altérité et qui ont une saine gouvernance ; on ne va pas tomber automatiquement dans ces ornières-là. 

Qu'est-ce qui fait la singularité de ce mouvement et de sa spiritualité ? 

 

Il y a plusieurs aspects.. D'abord, c’est une spiritualité de bénédiction ! Les membres sont invités à vivre dans l'Esprit pour apprendre à être présence du Christ. J'utilise de moins en moins le terme “évangélisation” parce que quand on a fait de l'oecuménisme avec les orthodoxes, avec les musulmans, ça ne passe plus. Mais il y a une manière d'être chrétien, une manière de témoigner, une manière de se situer à la jointure de ces enjeux du monde.

On invite les croyants à vivre une transformation par la présence christique. C'est ça le charisme. Donc il y avait la formation humaine, et une amitié avec le monde. Cette manière d'être présent au monde, c'est ça le charisme. On formait beaucoup des laïcs à devenir disciples du Christ, certains devenant permanents à temps plein, d'autres s'engageant substantiellement.

“Dieu ne reprend pas ses dons” est le titre de votre ouvrage. L’avez-vous expérimenté concrètement ? 

 

Ce titre-là, « Dieu ne reprend pas ses dons », vient du verset biblique Romain 11,29. Dans une traduction, c'est « Dieu ne reprend pas ce qu'il a donné et ne change pas d'idée à l'égard de ce qu'il a appelé ». 

A chaque rupture, à chaque fois, il y a eu des grâces qui ont été données, mais ces grâces sont données aussi parce qu'on fait un acte de foi. Un acte de foi en Dieu ou dans la vie. A chaque fois, il y a eu un nouveau déploiement. Il s’agit de se mettre en condition de recevoir de Dieu, de recevoir aussi des autres et d'ainsi faire confiance. Dieu nous donne au fur et à mesure ce dont nous avons besoin. Il faut un peu de droiture, un peu de fidélité et les ruptures ne sont pas des fins en soi, elles deviennent des étapes. C'est une parole d'espérance, rien n'est jamais perdu. 

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