"Le Puissant fit pour moi des merveilles : il élève les humbles"
Méditation de l'évangile (Lc 1, 39-56) par le père Emmanuel PIC
Chant final: "Tu es bénie, ô Marie" par la communauté de l'Emmanuel
En ces jours-là,
Marie se mit en route et se rendit avec empressement
vers la région montagneuse, dans une ville de Judée.
Elle entra dans la maison de Zacharie
et salua Élisabeth.
Or, quand Élisabeth entendit la salutation de Marie,
l’enfant tressaillit en elle.
Alors, Élisabeth fut remplie d’Esprit Saint,
et s’écria d’une voix forte :
« Tu es bénie entre toutes les femmes,
et le fruit de tes entrailles est béni.
D’où m’est-il donné
que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ?
Car, lorsque tes paroles de salutation sont parvenues à mes oreilles,
l’enfant a tressailli d’allégresse en moi.
Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles
qui lui furent dites de la part du Seigneur. »
Marie dit alors :
« Mon âme exalte le Seigneur,
exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur !
Il s’est penché sur son humble servante ;
désormais tous les âges me diront bienheureuse.
Le Puissant fit pour moi des merveilles ;
Saint est son nom !
Sa miséricorde s’étend d’âge en âge
sur ceux qui le craignent.
Déployant la force de son bras,
il disperse les superbes.
Il renverse les puissants de leurs trônes,
il élève les humbles.
Il comble de biens les affamés,
renvoie les riches les mains vides.
Il relève Israël son serviteur,
il se souvient de son amour,
de la promesse faite à nos pères,
en faveur d’Abraham et sa descendance à jamais. »
Marie resta avec Élisabeth environ trois mois,
puis elle s’en retourna chez elle.
Source : AELF
Le récit que nous venons d’entendre met en scène deux femmes. C’est suffisamment rare, dans la Bible, pour être noté. Dans ce récit, les hommes sont absents, ou plutôt ils sont présents en négatif, en puissance, en devenir, ils ne sont pas encore nés. Ces deux femmes les portent en elles.
De ce tête-à-tête entre femmes sont nées deux des prières les plus populaires de notre tradition chrétienne : une partie du Je vous salue Marie, et le Magnificat.
Ces prières sont faites de paroles fortes. « Tu es bénie entre toutes les femmes », dit Elisabeth à Marie. « Bienheureuse celle qui a cru » : Marie est la croyante par excellence, celle qui a accepté de parier sur Dieu pour construire toute sa vie de femme en se donnant tout entière à l’Esprit-Saint et au Verbe. Grâce à elle, nous savons que la Parole de Dieu n’est pas une parole en l’air, mais qu’elle est faite pour prendre chair.
Plus fortes encore sont les paroles du Magnificat : « Il renverse les puissants de leur trône, renvoie les riches les mains vides… » Les paroles de Marie ont été jugées à ce point subversives que d’aucuns ont souhaité les faire disparaître de l’Evangile ; pendant des siècles, il a été jugé préférable de les prier en latin, langue que le bon peuple ne pouvait comprendre.
Ces deux femmes parlent encore aujourd’hui. Elles ont parlé dans les mères argentines qui se réunissaient sur la Plaza de Mayo, jusqu’à faire tomber la dictature des généraux de ce pays. Elles parleront encore par la bouche des mères de soldats, en Russie, en Ukraine et ailleurs, qui ne manqueront pas de demander un jour des comptes aux chefs de guerre qui les ont envoyés à la mort.
Voilà ce qui se passe lorsqu’on donne la parole aux femmes : le monde devient plus humain, plus attentif aux autres et aux humbles. Voilà sans doute ce qui se passerait si, dans notre Eglise, on faisait droit à une parole de femmes : l’Eglise, elle aussi, en serait sans doute plus humble et plus compatissante.
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