Yasmina Khadra est un écrivain reconnu, traduit dans 52 pays et 46 langues. Aujourd'hui, il se confie sur son passé, dans un livre d'entretiens nommé "Le baiser et la morsure".
"Je n'ai jamais été en conflit avec mon passé", commence Yasmina Khadra. "Ce sont les épreuves qui forgent les convictions. Les échecs ne sont pas des fins, mais des recommencements".
Lorsqu'il atteint neuf ans, Yasmina Khadra est envoyé à l'école des cadets. Il découvre la rudesse de l'armée, la séparation d'avec sa famille. Cependant, il trouve en ses camarades de véritables frères, qui sont, d'ailleurs toujours ses amis.
"J'étais trop jeune pour savoir ce qui était bon ou pas, juste ou pas. Je ne pouvais pas avoir de recul. On apprend sur le tas, de blessure en blessure. âL’armée a été dure, peut-être, mais le déni, le non-respect, je l’ai rencontré après l’armée… dans le milieu parisien".
Yasmina Khadra évoque les difficultés rencontrées au cours de sa vie. "Je me suis toujours senti capable de leur résister", dit-il. Il déçoit la hiérarchie militaire algérienne en embrassant la littérature, aussi, on ralentit sa carrière.
"Mais je vis ma vie", insiste l'écrivain. "Je demande la même chose aux gens qui nous écoutent. Soyez des magiciens. Chaque fois qu'il y a un vide entre vous et votre projet, construisez des passerelles et avancez".
Le baiser symbolise la générosité donnée. La morsure... l'ingratitude retournée. "Le renvoi d'ascenseur a souvent été un retour de flammes", commente-t-il.
Il a été confronté aux atrocités de la décennie noire en Algérie. Ne perd-on pas son âme en assistant à de tels évènements? "C’est là où on prend conscience de ce qu’on est vraiment. Dans la quiétude, on voltige. Dans la difficulté, face aux atrocités, c’est là qu’on se découvre à soi, quand on est fait de chair et de sang".
Yasmina Khadra revient sur les moines de Tibhirine. Pour l'écrivain, ils incarnent le "summum de la maturité humaine. Ils ont sacrifié leur vie pour les autres. Le vrai humaniste, c'est celui qui se débarrasse de son confort pour partager la misère".
Il assiste à un attentat près de Mostaganem. "J'ai vu des enfants se confondre avec la poussière et le feu, tomber à terre sans vie. On se demande, pourquoi suis-je là? Imbécile impuissant qui regarde des enfants mourir? J'ai perdu la foi. J'en ai voulu au Seigneur de nous faire un tel affront".
Il évoque aussi la religion. "La religion permet aux gens intelligents d’être libres. Mais il y a des gens qui n’ont pas besoin de Dieu pour l’être. Ils sont bons, justes, loyaux, ils ont passé le stade de l’initiation. La religion nous initie à être meilleur. Aux yeux du Seigneur, ils sont aussi fiables que les autres".
C'est dans le désert que l'homme comprend sa véritable nature. "Le désert nous parle de notre finitude et nous prend à témoin. Regardez ce que je suis devenu ! Je suis né avec la terre... Vous, vous êtes fugacité, fulgurance, alors faites quelque chose de votre vie... Le désert nous rend humbles".
"Parfois, on est ébloui par sa réussite, mais le désert, d’une gifle nous renvoie au fait que nous sommes éphémères et que notre vocation, c’est d’être utile aux autres.
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