Le 11 janvier 2015: une date dont on souhaite avoir le souvenir d'une journée grave et légère à la fois. Il y a deux ans, au lendemain des attentats contre Charlie Hebdo et de la prise d'otages dans l'Hyper Cacher de la porte de Vincennes, quatre millions de Français descendaient dans la rue pour refuser la barbarie et réaffirmer les valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité. Deux ans après, pourtant, l'esprit du 11 janvier semble bien loin. Entre temps, il y a eu l'attaque du Bataclan, le 13 novembre 2015, puis la tuerie de Nice le 14 juillet 2016, ou encore l'assassinat du père Jacques Hamel, le 26 juillet. Les journées de terreur de janvier 2015 ne furent que les premières d'une longue série surtout si on la regarde a l'échelle européenne.
Et dans ces cas précis, plus une cellule psychologique est proposée vite "moins il y a de chances de développer un choc post-traumatique", a pu observer la journalise Lucile Berland. Les sapeurs-pompiers, qui été salués en héros, ont aussi été les premiers témoins de ces drames. Pour eux aussi il y aura un avant et un après. "On a une population qui est très jeune, explique Matthieu Petitclerc, aller au stade de France, à un concert, prendre un verre en terrasse c'est des choses pour lesquelles ils sont habitués." Le chef de la section médico-psychologique des pompiers de Paris a noté une "identification très forte" de la part de certains pompiers, envers les victimes.
Même si c'est difficile, une autre vie est possible, bouleversée, balbutiante, mais une vie quand même. Lucile Berland a rencontré et suivi neuf personnes, rescapées des attentats de janvier et du 13 novembre. Elle a voulu comprendre leur retour à la vie: ce sur quoi on s'appuie après un tel drame. Des témoignages qu'elle recense dans "En/Vie - Paroles d’espoir de rescapés d’attentats" (éd. Hugo & Cie), "pour donner une vision plus positive et optimiste de la figure du rescapé aujourd'hui". Selon elle, s'ils ont le désir de partager leur bonheur quotidien, c'est parce qu'ils ont "conscience de s'en être sortis". Et sans doute aiment-ils la vie peut-être encore plus qu'avant.
Sarah Gensburger se souvient: le 27 décembre 2015 elle a vu le trottoir du Bataclan enfin praticable. Ce fut alors une "libération physique et psychologique de regarder les alentours sans colère ni tristesse". Elle qui habite sur le boulevard Voltaire, non loin du Bataclan, vient de publier le journal de son quartier. Une enuqête de sociologue puisque c'est son métier, mais aussi de simple voisine, rompue toutefois à l'exercice de l'observation. Avant de publier "Mémoires vives" (éd. Anamosa) elle a tenu un blog, Chroniques sociologiques du "quartier du Bataclan". Cette spécialiste de la mémoire travaille sur la question de la place du passé dans la ville depuis plusieurs années. Son ouvrage elle veut inciter le lecteur "à regarder autour de lui, la vie quotidienne: il y a tellement de choses à regarder et à réfléchir". Etre contemplatif dans son propre quartier, une façon de reprendre goût à la vie?
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