Nous sommes toujours confinés et préoccupés par cette épidémie qui bouleverse notre quotidien, mais cela ne nous empêche pas de nous souvenir qu’il y a 75 ans, c’était la fin de la guerre, enfin, et que les derniers camps de concentration étaient libérés, commémorations du 8 mai demain. On a tout dit, tout lu sur cette période terrible, sur la shoah, à commencer par les grands livres de Primo Levi, Elie Wiesel, Robert Antelme… On pense aussi à Anne Franck, et voici que des témoignages reviennent encore à la surface : c’est ce que raconte cette BD.
Le graphisme de Thibaut Lambert a le mérite d’être accessible à toutes les tranches d’âge, avec une visée clairement pédagogique, un traitement très simple qui laisse toute la place à l’histoire. Louise est juive, elle vit à Paris avec ses deux sœurs, son frère, ses parents. Son père a fui les pogroms en Urkraine au début du XXe siècle, mais voilà que, dans la capitale occupée, les juifs ne sont plus en sécurité non plus. Ce qui devait arriver arriva : toute la famille est arrêtée le 22 janvier 44, envoyée au camp d’Auschwitz où ils sont immédiatement gazés. Louise avait 16 ans. Cette élève douée, passionnée, passait son temps à lire. Elle avait noué de vrais liens d’amitié avec Anne-Marie Malingrey, et son professeur de latin-grec au lycée Jean-de-la-Fontaine aurait bien voulu la protéger. Avant d’être arrêtée, Louise confia ses livres et quelques lettres à son enseignante. Des lettres qui ont bien failli disparaître et qui sont parvenues jusqu’à nous, grâce au travail de Stéphanie Trouillard.
Elle a réalisé un webdoc particulièrement riche – c’est accessible et pratique en temps de confinement, avant la réouverture des librairies. Ce site regroupe les facsimile des lettres, mais donne aussi des précisions historiques et retrace le cheminement des lettres de Louise, perdues au fond d’une armoire, retrouvées et découvertes avec émotion. Ces lettres sont pleines de sagesse et de poésie. Allez, juste un extrait : "Je pense que les Grecs avaient raison de considérer comme la plus grande souffrance, celle de ne plus voir la lumière du soleil, écrit l’adolescente à l’étoile jaune sur la poitrine. Oh oui ! Pouvoir respirer l’odeur de l’herbe, voir le soleil dans les champs et à défaut, voir même les couchers de soleil à Paris, admirer les étoiles, c’est bien la première joie." Stéphanie Trouillard a fait un énorme travail de documentation autour de ces lettres, des photos de la famille de Louise, un hommage émouvant. Comme quoi, la cruauté de la shoah n’a pas le dernier mot : "Au milieu de la nuit, une lumière éclatera" : c’est une jeune fille juive qui écrivait ces mots. C’était il y a 75 ans.
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