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La métropolisation accentue la désertification
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La métropolisation accentue la désertification

RCF,  -  Modifié le 26 novembre 2018
D'un côté une "métropolisation" des grandes villes, de l'autre une dévitalisation des villes moyennes accompagnée d'une paupérisation. L'édito du Père Bernard Devert.
DR - Père Bernard Devert DR - Père Bernard Devert

Nous assistons à une métropolisation massive en France, comme dans le monde, d’où une dévitalisation des petites villes et même des villes moyennes. Sommes-nous si sûrs que la concentration des habitants, des pôles d’activités et des espaces de culture soit une bonne réponse à la cohésion du territoire ?
 
Un arrêt sur image s’impose. La traversée des villages et des petites villes donne à voir une paupérisation qui n’est pas sans affecter le patrimoine affichant des panneaux à louer, à vendre. Un désert se dessine ; il est sans oasis. À Paris, trois écoles ont fermé cette année. Que de familles n’ont plus accès à la ville en raison de loyers inabordables, concurrencés par des plateformes à vocation hôtelière (Airbnb). Certes, des régulations sont mises en œuvre, mais cet habitat temporaire pour des touristes fortunés fait florès dans les beaux quartiers.
 
Montluçon a perdu 20.000 habitants en 50 ans. L’activité économique dépérit, 2.000 logements vacants, plus de 2.500 à Nevers, alors que tant de familles en Ile-de-France doivent attendre sept ans pour disposer d’un appartement dans le parc social. Le budget de la ville de Paris pour le logement social est de plus de 500 millions d’euros. Les budgets enflent pour les métropoles et s’amenuisent pour les villes moyennes et plus encore pour les petites.
 
Le mal-logement s’aggrave dans les métropoles et l’habitat se détériore dans un grand nombre de départements, désarmés face à l’exode de leurs habitants. Les valeurs républicaines sont blessées, de par l’absence, depuis de longues décennies, d’une politique d’aménagement du territoire capable de réguler, de structurer et de mettre en œuvre des formations pour de nouvelles activités.

La métropolisation brise :
• l’égalité entre les territoires, mais la République n’est-elle pas une et indivisible ;
• la liberté. Quand les usines et ateliers ferment, que reste-t-il comme choix, sinon celui de rejoindre les métropoles pour tenter de trouver un travail ? Cependant, si la métropolisation était la réponse, assisterions-nous à un chômage touchant 2,5 millions de personnes ;
• La fraternité. Que d’anonymat ! Les métros et les TER sont souvent les wagons de l’indifférence ; tant de voyageurs sont fatigués par ces temps de transport amputant leur sommeil. Qui n’est pas touché par ces femmes partant très tôt pour faire du ménage dans les entreprises, leur salaire ne leur permettant pas de se loger à proximité de leur lieu de travail ; alors, il leur faut habiter loin, trop loin.

Les métropoles laissent briller au cœur de leurs villes des lumières qui font miroiter bien des illusions. Si tout semble possible, les promesses ne sont pas au rendez-vous. Que de solitudes profondes et même désespérées ne trouvent plus à se cacher dans les grandes villes. Le Grand Paris se prépare ? N’y aurait-il pas une autre réflexion à retenir ? Est-ce trop tard que d’envisager de transférer des investissements vers des villes moyennes, leur permettant d’offrir un avenir à ceux qui y vivent encore ? Jean-Louis Schilansky, président du Medef à Paris, s’inquiète de l’inflation du projet des prélèvements sur les entreprises pour financer le futur métro automatique francilien, hier évalué à 20 milliards, aujourd’hui réévalué à 35 milliards.
 
La digitalisation entraînera une révolution du travail qui devrait donner un atout aux petites et moyennes villes, réserve faite qu’elles développent l’intercommunalité. Mon propos n’est pas d’opposer les métropoles aux villes moyennes ou petites. L’heure est de s’inquiéter de leur synergie pour que la vitalisation des unes n’entraîne pas la dévitalisation des autres dont l’assèchement ne s’arrêtera pas par le seul ruissellement des premières.
 
La métropolisation est liée à des volontés de puissance, entraînant une course entre les quelques grandes villes pouvant prétendre, via des critères disqualifiant les plus petites, à disposer de lieux de pouvoir. Ne serait-ce pas la peur de la fragilité créant paradoxalement des outrances pour ne point être saisie comme un levier facilitant les métamorphoses dont nos territoires ont besoin ?

 

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