L'entreprise CLS, dont une antenne est basée à Plouzané (29), est chargée de définir et d'ajuster la ZEA ou Zone d'exclusion Antarctique en analysant des images satellites. L'objectif: éviter que les skippers ne heurtent des icebergs. Reportage.
Ils sont les vigies, les yeux qui veillent sur les cinq skippers de l'Arkea Ultim Challenge encore en lice, après l'abandon de Tom Laperche après une avarie.
Dans ce vaste bureau de l'entreprise CLS, dont une antenne est basée à Plouzané, une équipe de six analystes se relaient jour et nuit, 24h sur 24. Une salle d'opération remplie d'écrans, où ces experts "se chargent de programmer, réceptionner et analyser des images satellites en temps réel notamment à des fins de surveillance maritime, détection de pollution par exemple", précise Arnaud Blanchard. Il est responsable du pôle opérations au département sécurité maritime de CLS. Mais la cellule est aussi en charge de veiller au bon déroulé de l'Arkea Ultim Challenge, premier tour du monde en solitaire en Ultim, qui a démarré le 7 janvier. Plus précisément, leurs analyses de données permettent de définir la Zone d'Exclusion Antarctique (ZEA), zone au delà de laquelle les skippers risquent fort de heurter des icebergs.
Justement sur un des postes, face à quatre écrans d'ordinateur, Jimmy Viard est en pleine analyse d'image. Il est un spécialiste de l'étude des icebergs. Pour les détecter plusieurs techniques sont utilisées, notamment l'imagerie satellitaire, radar ou optique. "Sur un écran on voit les images que j'ai programmé. On est en train de travailler sur le Pacifique, on a quatre images qui ont été commandées et là on va en commander d'autres jusqu'au Cap Horn", détaille l'expert.
Sur ces images, Jimmy est chargé de repérer les petites traces blanches des icebergs. Mais comment savoir où chercher ? "C'est grâce à l'altimétrie c'est à dire à des satellites qui nous permettent de mesurer la hauteur des océans. Ce sont nos collègues de Toulouse qui analysent ces signaux", poursuit Jimmy Viard. "Grâce à ces données, on va définir des zones à densité d'icebergs. On transmet ensuite tout cela à la direction de course, et on définit une première version de la ZEA."
Une technique qui a ses limites, certains blocs de glace qui dérivent, appelés "growlers" ou des icebergs de moins de 80 mètres ne sont pas détectables. Il faut donc pouvoir maintenir la compétition, et la stratégie des skippers pour optimiser leur itinéraire, tout en gardant une marge de sécurité quant à la définition de la ZEA. "La vérité de terrain, on ne l'aura pas. La seule vérité de terrain qui existe c'est celle du skipper à l'oeil nu", admet Jimmy Viard. "Mais ce n'est pas jouable, on ne peut pas envoyer un skipper à 35 noeuds la nuit. Ils n'ont pas le temps de manoeuvrer et d'éviter un iceberg."
Des compétitions dont CLS est familière. L'aventure a commencé en 2008 avec le Vendée Globe. Et Jimmy Viard, ne peut cacher son admiration pour les skippers. "Moi j'adore ces bateaux, j'ai rencontré plusieurs fois les skippers. Ce sont des aventuriers, sourit-il, peut-être les derniers à nous faire rêver sur la planète."
Il est d'ailleurs temps de se remettre au travail, car les courants, les vents évoluent chaque seconde. Pas de répit pour les six experts, avant au moins le passage des Malouines pour les skippers de l'Arkea Ultim Challenge.
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