A cette occasion, Stéphanie Gallet reçoit Bernard Bourdin, dominicain, historien, philosophe, professeur à l’Université catholique de Paris. Ce dernier a beaucoup travaillé sur le rapport entre politique et religieux. Il est l’auteur de "Souveraineté, nation, et religion : dilemme ou réconciliation" (éd. du Cerf). Il est récemment le signataire, dans la revue Études, d’un article sur la visite d’Emmanuel Macron aux Bernardins.
La visite d’Emmanuel Macron à Rome, mardi 26 juin, "nous dit que le régime de laïcité en France depuis 1905 a évidemment modifié le rapport entre l’Église catholique et la République française, mais qu’il ne signifie pas en même temps qu’il n’y a pas une continuité historique. Le titre de chanoine honoraire du Latran en est le témoignage historique le plus évident, puisque ce titre remonte à Henri IV lui-même, qui a donc porté ce titre en récompense au soutien financier au chapitre de la basilique du Latran" explique Bernard Bourdin.
Depuis 1905, la France s’est séparée de l’Église catholique, mais leur relation est toujours passionnée. "Elle est passionnée, elle est passionnante, et comme toute relation elle est faite d’amour et de conflits. Le président Macron lui-même disait qu’il fallait réparer cette relation abîmée entre l’Église catholique et la République française. Les rapports ne sont pas toujours faciles, car les liens sont très anciens", ajoute le dominicain.
Sur le plan diplomatique, "le Vatican est un État. Le pape est à la fois un chef spirituel, mais il est aussi le chef d’un État temporel, le Vatican. Comme tout État il entretient des rapports diplomatiques. Il y a forcément une relation au travers de ce titre de chanoine honoraire du Latran, qui n’est pas toujours accepté par les présidents. Il y a un enjeu diplomatique évident" précise Bernard Bourdin, citant les sujets qui seront vraisemblablement au menu de la discussion entre François et Emmanuel Macron : les migrants, la bioéthique, la laïcité.
Cette rencontre revêt également un aspect plus personnel. Elle va permettre aux deux hommes de pouvoir mieux se connaître. "Je pense que le président Macron en sait plus sur le pape que le pape n’en sait sur le président Macron. Le pape François a été élu en 2013, il a eu le temps de se faire connaître. Le président Macron a également une connaissance qui le rend sensible à l’Église catholique. Quant au pape François, c’est autre chose. Il n’a toujours pas visité la France. Mais il a un intérêt pour le président Macron" estime le dominicain.
Pour bien comprendre cette journée, il faut avoir en tête quelques éléments du discours de Macron aux Bernardins, même si ce dernier avait une portée nationale. "On voit bien que dès le commencement de son discours, Emmanuel Macron a souvent répété les mots de nation française, et de cohésion nationale. Et pour lui, l’Église catholique y joue un rôle clé. On prête au président Macron un souci électoraliste. Au-delà de ça, il ne faut pas l’entraîner simplement là-dedans. Il a une sensibilité et une conviction culturellement catholique" conclut Bernard Bourdin.
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