Gérald Darmanin s’obstine. Peut-être au-delà du raisonnable… Dans le JDD de dimanche dernier, le ministre de l’Intérieur annonce que l’article 24 de la loi "sécurité globale" ne sera pas recyclé dans le projet de loi "contre les séparatismes". Cette piste évoquée pendant une quinzaine de jours ressemblait pourtant à une ouverture possible pour sortir de la crise politique.
Dans le projet de loi "confortant les principes républicains", l’article 25 prévoit de punir de 5 ans de prison et 75.000 euros d'amende le fait de "révéler, diffuser ou transmettre" de manière malveillante "des informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle d'une personne permettant de l'identifier ou de la localiser" lorsque la victime est chargée d'une mission de service public ou dépositaire de l'autorité publique.
Cette solution de compromis permettait de contourner certains écueils de la proposition de loi "sécurité globale" et de son trop fameux article 24. Elle était sans doute suffisamment protectrice pour les forces de l’ordre et elle évitait d’attaquer frontalement la liberté d’informer en offrant aussi une possibilité de compromis (certes imparfait) dans la crise actuelle.
Mais Gérald Darmanin n’en veut pas au motif qu’"être policier ou gendarme, c'est très particulier. On doit continuer à protéger spécifiquement les forces de l'ordre".
Sous la pression des syndicats de policiers, le ministre installe ainsi le ministère de l’Intérieur en borne-relais des revendications policières. Est-ce vraiment son rôle ? Gérald Darmanin n’hésite pas beaucoup : "Moi, je prends des coups pour les policiers et les gendarmes. Je suis fier d'être un chef qui défend ses troupes, qui ne s'en va pas comme une volée de moineaux quand il y a un problème".
Heureusement, nous n’en sommes pas encore aux conclusions de toute cette affaire. La proposition de loi "sécurité globale" doit être examinée par le Sénat en janvier puis revenir à l'Assemblée, où la majorité a promis une "réécriture totale" de l'article 24.
Il faudra alors aux parlementaires une formidable créativité pour faire baisser les critiques adressées à cette proposition de loi transformée peu à peu en projet de loi porté par Gérald Darmanin.
Le ministre de l’Intérieur depuis le début a déjà dû mettre beaucoup d’eau dans son vin, essuyer les critiques d’une partie de la majorité LREM qui ne comprend pas son obstination et celles du chef de l’État et du Premier ministre qui n’avaient pas besoin de cette polémique supplémentaire. Aller trop vite et trop loin fait courir des risques à tous… Et pas seulement aux journalistes.
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