Quelques jours après l’attaque à l’arme blanche à Annecy, il peut être encore difficile d’en parler avec votre enfant, curieux. Certains parents ont peut-être préféré se taire, nier, et protéger leur enfant. D’autres, ont accepté de discuter mais se sont heurtés à des questions trop dérangeantes. Comment parler d’actualité à nos enfants ? Faut-il en parler ? On fait le point.
“Maman, pourquoi le monsieur est entré dans le parc avec un couteau ?”. Au lendemain du drame d’Annecy, vous avez peut-être été confrontés à ce type de questions dérangeantes. Comment préserver l’innocence d’un enfant, tout en lui faisant prendre conscience du monde dans lequel il grandit ? Comment expliquer, que oui, un homme a surgi avec un couteau dans un parc en plein centre-ville d’Annecy, pour tuer ou tenter de tuer des enfants de son âge ?
Les spécialistes sont unanimes : il faut déjà pouvoir en parler. Refuser les questions de son enfant, sous prétexte d’un sujet tabou, ne pourrait que le desservir sur le long terme. La vraie réponse à toutes ses questions doit être adaptée à son âge. Dès la toute petite enfance. “Vous allez me dire, on ne parle pas aux bébés mais on peut. Il faut pouvoir dire, ‘oui je suis inquiète, il s'est passé des choses graves mais je suis là”, explique Hélène Romano, auteur de “L’enfant face au traumatisme”. Pouvoir mettre des mots sur ses émotions reste encore le meilleur moyen de les maîtriser.
Pour les petits ? Il faut pouvoir adapter le vocabulaire à son langage, tout en le rassurant. “Pas besoin de rentrer dans les détails. Il y a un méchant qui a fait du mal à des petits, mais il y a eu les secours. Le méchant a été arrêté. Et c’est pour ça que maman et papa pleuraient tout à l'heure et étaient inquiets”, détaille la docteure en psychopathologie.
Pour certains parents, il peut être difficile de parler d’actualité aux enfants. Comment discerner, comment savoir quelle actualité est bonne à raconter ou non ? Comment ne pas tomber dans la surprotection ? Ou à l’inverse, parler de tout au risque de voir votre enfant se forger un climat anxiogène autour de lui ?
L’Ukraine, le réchauffement climatique, le harcèlement scolaire, difficile de décrypter ces actualités. Cependant, certains professionnels le font très bien comme les médias spécialisés. Le Petit Quotidien, 1Jour1actu, ou le JDE, le journal des Enfants. Ce dernier fêtera ses quarante ans l’année prochaine. Son objectif : traiter l’actualité de façon adaptée à nos enfants, sans tabou, mais sans marasme. “On met de la distance et on enlève la dimension émotionnelle des faits”, raconte Caroline Gaertner, responsable éditoriale du JDE.
Une approche adoptée en 2015 au moment des attentats de Charlie Hebdo. “Si vraiment, le sujet soulève un vrai débat de société et une vraie question, alors on le traite”, poursuit-elle. “Tous les sujets ont été abordés. Parfois, ça peut être délicat pour certains parents, qui nous écrivent après parution de certains articles. Des articles sur la religion ou la sexualité. Mais nous on peut parler de tous les sujets à partir du moment où ils ont un vrai intérêt”, justifie Caroline Gaertner.
À la maison, dans la presse spécialisée, mais c’est aussi à l’école que se joue l’éducation à l’information et au monde des médias. Discerner, comprendre, analyser, décrypter, autant de sujets dont la matière n’existe pas à part entière. “C’est plus un module transversal”, explique Etienne Millien, journaliste et directeur de l’APEM, association pour l’éducation aux médias.
Des professionnels se rendent dans des classes pour expliquer en fonction de leur âge, l'actualité et les médias. “Il ne s’agit pas d’arriver dans une classe et dire ‘voilà, c’est comme ça qu’il faut s’informer, au revoir’. C’est une démarche complète par des enseignants”, raconte le directeur de l’APEM.
Pouvoir parler d’actualité sans tabou avec son enfant, tout en le préservant avec un vocabulaire adapté à son âge, c’est l’immense défi de chaque parent, tous les jours.
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