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Création de cardinaux : le pape prépare la future gouvernance de l'Eglise

Un article rédigé par Yves Thibaut de Maisières - 1RCF Belgique, le 23 décembre 2024 - Modifié le 23 décembre 2024
16/17Création de 21 cardinaux : le pape prépare la future gouvernance de l'Eglise

Un consistoire s'est tenu à Rome le 7 décembre 2024. La dixième occasion pour le pape François de renouveler la gouvernance de l'Eglise catholique en nommant 21 nouveaux cardinaux.

Comment a-t-il fait son choix ? Que fait un cardinal ? Quels sont les prélats mis à l'honneur cette année ?

Le journaliste et théologien de CathoBel Christophe Herinckx est l'invité d'Yves Thibaut de Maisières. Il était présent au consistoire à la basilique Saint-Pierre au Vatican.

Barrettes cardinalices à Rome ©Capture d'écran consistoire diffusé sur KTOBarrettes cardinalices à Rome ©Capture d'écran consistoire diffusé sur KTO

Le jour de la réouverture de Notre-Dame de Paris avait lieu à Rome, au Vatican, un événement qui d'une certaine manière dessinera l'avenir de l'église catholique. Le 10e consistoire sous le pontificat du pape François a permis au souverain pontife de créer 21 cardinaux. 

Des cardinaux pour assurer la continuité 

C’est le dixième consistoire du pape François en bientôt 12 ans de Pontificat. Ce chiffre nous donne-t-il une indication sur le besoin du pape de créer des cardinaux pour renforcer son équipe de conseillers ?

Christophe Herinckx : Le pape choisit bien sûr des cardinaux qui vont élire le chef de l’Eglise, ce sont les cardinaux électeurs. Mais les électeurs ont une limité d’âge qui est de 80 ans. Depuis 1962,  ce sont des évêques qui sont choisis. Mais le pape peut aussi choisir de nommer un prélat par amitié, par reconnaissance, par loyauté, ou bien parce que ce sont des personnalités marquantes. 

Au 16e siècle, ils étaient septante. Ils sont 120 depuis depuis quelques décennies. Les cardinaux vieillissent et donc, régulièrement, il faut renouveler leur collège. Aujourd'hui, ils sont 140 électeurs, ce qui est une bonne moyenne. Donc, c'est ça qui explique, je dirais, la régularité de ces consistoires. Sous le pontificat de Saint Jean-Paul II il y avait moins de consistoires, mais davantage de nominations. Logiquement, le pape sait qu'en nommant des cardinaux il prépare le conclave suivant, c'est-à-dire la continuité de l’institution, qui n'est jamais une continuité absolue. La politique cardinalice de François semble assez claire. Il souhaite nommer des prélats capables de continuer les réformes qu'il a entreprises dans l'Église. Il y a une sorte de rééquilibrage qui se fait. 110 sur les 140 ont été choisis par le pape François à l'heure actuelle, c'est une grande majorité. 

Représentativité et synodalité 

Qu’est-ce qui guide le choix du Souverain pontife pour nommer un cardinal ?

C. H. : Le pape François choisit des cardinaux issus de tous les pays du monde, en tout cas de tous les continents. Je vais vous donner un exemple : on s'est étonné - au début du pontificat en 2013 - que l'archevêque de Malines-Bruxelles, Monseigneur Léonard à l’époque, ne soit pas devenu cardinal (alors que c’était la tradition). Et en France, ça fait quelques années que l'archevêque de Paris n'est pas nommé cardinal d’office. Le pape argentin a voulu diversifier l'origine des cardinaux pour assurer une plus grande représentativité, ils participent quand même à la gouvernance universelle de l'Église, il induit quelque part une forme de synodalité aussi dans ce choix des cardinaux. Aujourd'hui, les cardinaux européens sont 55, alors qu'autrefois ils étaient toujours majoritaires sur les électeurs ; sur les 140, une vingtaine provient d'Amérique latine ; une vingtaine d'Amérique du Nord ; 18 sont issus de pays Afrique et 25 d'Asie. 

 

Le pape argentin a voulu diversifier l'origine des cardinaux pour assurer une plus grande représentativité dans l'Eglise. 

Communautés chrétiennes minoritaires

C. H. : Un deuxième élément de poids dans le choix du chef de l’Eglise catholique. L’attirance de François se porte vers des pays où les communautés chrétiennes sont très minoritaires. C’est une manière d’encourager celles-ci et de leur faire part d’une reconnaissance. D’autre part, un cardinal nommé dans un pays où la foi est menacée ou du moins minoritaire, donne une légitimité voire une certaine protection par rapport au risque que certains régimes peuvent faire peser sur ces minorités. Quelque part, c'est l'archevêque ou l'évêque en question devient un interlocuteur de premier plan pour les autorités politiques en place qui donc souvent.

Dans certains pays, on peut notamment penser à un belge, le cardinal Mathieu né à Arlon et archevêque de Téhéran, ou encore citer le cardinal Jean-Paul Vesco à Alger où vit une communauté de 4000 fidèles. Ça se fait aussi dans des pays à grande majorité hindou ou bouddhiste, par exemple, où le pape a choisi pas mal de cardinaux. D’autre part, ce qu'on sait rarement, c'est que c'est aussi une fierté pour le pays en question. Il y a une double reconnaissance. En nommant, par exemple, Dominique Mathieu, cardinal de Téhéran, le Saint-Siège reconnaît les relations diplomatiques entre le Saint-Siège et l'Iran depuis 1953. La diplomatie du Saint-Siège a toujours été de pouvoir parler avec tout le monde. 

Concevoir le rôle de cardinal comme serviteur

Faut-il bien s'entendre avec le pape pour être cardinal ?

C. H. : En tout cas, au moment où un évêque devient cardinal, il y a un lien très fort qui se crée avec le pape. Il y a une forme de loyauté particulière d'un cardinal par rapport au pape. Ce sont ses proches conseillers. Je pense qu’il serait erroné de penser que le pape François, comme ses prédécesseurs, choisit un cardinal par affinité. Ça peut exister mais au-delà des affinités personnelles, il y a, je dirais, une même politique pastorale. Une vision des besoins de l’Eglise aujourd’hui. Ça suppose évidemment que le pape soit bien informé. On peut dire que le pape repère quelque part des personnalités. Il est peu probable qu'il nomme quelqu'un qui lui soit véritablement opposé. 

Quel message retenez-vous de ce consistoire auquel vous avez assisté le 7 décembre dernier ? 

C. H. : J’ai été marqué par cette allocution que le pape a donnée en appelant les cardinaux à être le plus petit, si vous voulez être le plus grand. Faisons référence aussi à la lettre qu'il a envoyée aux cardinaux et qui a été rendue publique. Quand on entend les cardinaux actuels, on a le sentiment qu’ils conçoivent leur rôle comme un service, un sacerdoce, et cette vision se retrouve dans le parcours de ces prélats. Souvent, ce sont des hommes qui sont choisis en raison de leur caractère de zèle apostolique, pour être capable de parler aux autorités et d’avoir une influence. Parfois même, ils ont un rôle dans la réconciliation des peuples dans leur pays. C'est donc d'une part cette belle image de catholicité. Pour moi, c'était un consistoire très synodal, dans le sens où la diversité de l'Église se remarque. Le pape est le garant de l'unité et c'est cette unité dans l'universalité qui m'a frappé dans ce consistoire. 

Lire l'article publié par le journal Dimanche et CathoBel. 

Le 16/17 ©1RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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