Il aura fallu plusieurs années pour que les bénédictines du Sacré-Cœur de Montmartre, à Paris, sortent du silence et mettent des mots sur les abus et violences subies. Dans un communiqué diffusé à la presse fin avril, les sœurs de la congrégation et celles l’ayant quittée, demandent pardon pour les abus qui ont rongé leur communauté.
« Dans cette déclaration, nous exprimons publiquement la souffrance des sœurs à la fois sorties et encore à l’intérieur de l’institut, qui ont subi des années d’emprise », explique Sœur Marie Jérémie, conseillère générale de la congrégation des bénédictines du sacré cœur de Montmartre. Qu’il s’agisse d’abus spirituels, de conscience, d’abus de pouvoir ou d’autorité, les auteures du communiqué reconnaissent je cite « un système d’emprise, aux conséquences graves et durables, mis en place sur plusieurs décennies » par les anciennes responsables.
Roseline de Romanet a fait les frais de cette emprise. Prieure de la congrégation entre 1998 et 2004, elle a subi de nombreuses humiliations et affirme qu’elle n’a jamais pu exercer sa fonction en raison de l’influence de la précédente prieure. Outre le fait que les sœurs ne pouvaient consulter un médecin seule, l’ancienne prieure désormais sortie de la vie religieuse, raconte que « la relation avec les familles était bafouée. Lorsqu’elles venaient nous voir au parloir, bien souvent des sœurs écoutaient derrière les portes, on ne devait jamais rien dire de négatif de la congrégation. Il y avait une culture du silence extrêmement forte ». Si forte qu’elle ne pouvait même pas maintenir la relation avec sa sœur, pourtant elle aussi membre de la congrégation. Maintes fois, Roseline de Romanet a voulu démissionner mais elle subissait un chantage affectif et spirituel.
Malgré deux visites apostoliques - la première il y a près de 20 ans en 2004 et la seconde en 2012 - rien n'avait changé. Un laps de temps que Sœur Marie Jérémie justifie par « un chemin de réforme qui a été très long, trop long, reconnaît-elle, mais nous avons eu besoin de ce temps pour nous remettre sur pied, pour être davantage lucide de notre histoire passée, pour pouvoir en parler avec plus grande liberté ».
Aujourd’hui, les sœurs bénédictines demandent pardon aux victimes et à leur famille. Une étape importante avant d’entamer un nouveau chemin de réforme pour éviter de nouvelles dérives. La congrégation veillera désormais à « un juste exercice de l’autorité », ainsi qu’à la formation continue et l’accompagnement spirituel et psychologique de chaque sœur. Les signataires de cette déclaration demandent également la mise en place d’une commission indépendante et pluridisciplinaire. Cela dans le but de mieux identifier les dérives et d’envisager les contours d’une réparation.
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