Depuis plusieurs semaines, le chantier d'un grand centre religieux à Saint-Pierre-de-Colombier (Ardèche) oppose des chrétiens locaux et des militants écologistes. La tension est montée d'un cran mi-octobre, lorsque des religieuses et des opposants au chantier en sont venus aux mains. À l'heure où le Pape publie son deuxième volet d'un texte appelant les catholiques à davantage de responsabilités sur "la maison commune", les militants écologistes redoutent une détérioration du site naturel.
La polémique a commencé en 2018 dans le petit village de Saint-Pierre-de-Colombier dans les Monts d'Ardèche. Les religieuses du petit village situé dans la vallée de la Bourges souhaitent lancer un complexe religieux d’envergure pour accueillir des pèlerinages. La population se divise et le début du chantier provoque des remous.
Ce n’est qu’en octobre 2023 que le chantier prend une tournure nationale. Une scène captée par une vidéo de nos confrères de France 3 Auvergne-Rhône-Alpes montre une religieuse plaquer l’un des militants écologistes, opposé au projet. Les membres de la congrégation religieuse ont également créé une grande chaîne humaine entourant le chantier pour ne pas compromettre son avancement.
“Un sujet douloureux”, admet Gaultier Bès, cofondateur de la Revue Limite. Lui qui connaît la congrégation religieuse et les lieux assure “émettre des réserves pour ne pas dire une forme d’opposition à ce chantier”. Ce n’est évidemment pas les sœurs de la Communauté de la famille missionnaire de Notre Dame qui lui pose un problème, mais bien un chantier qui ne rentre pas dans le cadre du tome 2 du texte sur l’écologie du Pape François appelant à “préserver notre maison commune”. En clair : la construction d’un tel édifice, bien qu’il soit religieux, pourrait être dévastateur pour l’environnement et la biodiversité.
Des religieuses qui protègent une pelleteuse...
— Gaultier Bès (@GaultierBes) 16 octobre 2023
A l'heure où les chrétiens devraient rejoindre en masse les luttes contre la destruction du vivant - de la Création -, et même si leur sincérité est hors de doute, quel contre-témoignage...https://t.co/ggRjGIhKtk pic.twitter.com/YEjmCHCXNh
Face à la situation, les militants écologistes bloquent l’accès aux engins de chantier alors que de son côté, la préfecture avait bel et bien donné son feu vert fin 2022, une fois obtenue des études supplémentaires. Pourtant, selon Gaultier Bès, le chantier est largement disproportionné par rapport aux besoins de la région. “On parle d’un village de 400 habitants, d’une communauté certes dynamique, féconde et missionnaire, mais pour une église de plus de 3000 places avec une grande capacité d’accueil, et les parkings qui vont pour accompagner les autocars. C’est le caractère disproportionné qui interroge”, assure celui qui est le visage de l’écologie intégrale.
L'objectif désormais pour les autorités locales est de rétablir le dialogue entre la congrégation religieuse et les militants écologistes. La préfecture refuse à l’heure actuelle de prendre parti pour l’un ou l'autre. Difficile également pour les instances administratives. “Il y a un débat juridique. C’est complexe, il y a la loi, il y a des recours, etc”, rappelle Gaultier Bès alors que l’Etat a en effet fait stopper le chantier en 2020 avant de reprendre.
La communauté chrétienne locale aussi se divise. "L’évêque, ainsi que le Vatican, sont plutôt opposés à la construction de cette grande église”, énonce le cofondateur de la revue Limite. La congrégation religieuse s’isole alors même que les militants écologistes se radicalisent sur les lieux du chantier. “C’est un sujet douloureux car évidemment, aux arguments écologiques, tout à fait audibles des opposants, s’ajoute une certaine opposition anti-cléricale, plus problématique”, conclut Gaultier Bès.
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