Sale temps pour Bercy. Le ministère de l'Economie a dû digérer cette semaine deux mauvaises nouvelles, dans le secteur de l'industrie. Tout d'abord, le refus du groupe automobile Ford de reprendre son usine de Blanquefort en Gironde. Puis la reprise annulée de l'aciérie Ascoval par le groupe Altifort, faute de moyens financiers.
Bruno Lemaire perd le bras de fer engagé avec Ford. Pataquès sur le dossier Ascoval. Le ministre de l'Economie a connu des jours meilleurs. Les 281 salariés de l’aciérie de St Saulve dans le Nord ont obtenu mercredi un mois de sursis. La chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg a officiellement annulé la reprise par Altifort. Le dossier est renvoyé au 27 mars.
L’horizon est plus sombre pour les 850 salariés de l’usine Ford de Blanquefort en Gironde. Le constructeur américain a décidé de fermer et a refusé une nouvelle fois, lundi dernier, l’offre de reprise du belge Punch. Deux dossiers qui laissent un goût amer aux salariés et de nombreuses questions. Bruno Lemaire a indiqué notamment qu’Altifort avait trompé tout le monde sur sa situation financière. Pour l’économiste Gabriel Colletis, enseignant à l’université de Toulouse, l’Etat ne pouvait pas ignorer la situation réelle du repreneur.
Gabriel Colletis parle d’une responsabilité de Vallourec. Pour lui, dans ces dossiers, Ford a une responsabilité évidente, tout comme Vallourec. Spécialisé dans les tubes sans soudure, utilisé notamment dans l’industrie pétrolière, le groupe Vallourec s’était désengagé en cédant 60% du capital en de son aciérie en 2017 en raison de difficultés économiques. L’aciérie est ainsi devenue Ascoval. Précisions avec Gabriel Colletis.
Toujours selon Gabriel Colletis, Bercy avait les moyens de mettre davantage la pression sur Valourec via BPI France actionnaire de l’entreprise.
Et du coté de la Gironde, la colère gronde. La fermeture de l’usine est engagée. Jean-Luc Gleyze, président du Conseil départemental de la Gironde, rappelle que Ford n’a pas tenu ses engagements. Le constructeur a bénéficié de 25 millions d'euros de subventions publiques durant cinq ans. Ford ne peut pas partir sur la pointe des pieds, estime de son coté Benoit Simian, député LREM de Gironde.
Finalement, ces deux cas d’écoles pourraient révéler un problème de l’économie française. Pour certains économistes, l’Etat est trop dans la réaction et l’urgence, et il manque de vision stratégique. C’est du moins ce qu’estime Henri Sterdyniak, économiste à l’OFCE.
Pour d’autres, l’Etat est simplement rattrapé par le principe de réalité du marché actuel et de l’évolution des besoins. Philippe Darmayian, président de l’Union des Industries de la Métallurgie estime que ces dossiers sont des exceptions dans un paysage industriel qui relève la tête. Et pour lui il y a bien une stratégie claire.
Le problème est donc pour lui davantage sur les capacités des entreprises à s’adapter et à former les salariés. Bruno Le Maire dresse un bilan positif de sa politique industrielle depuis un an. "Depuis deux ans, sur 4 emplois menacés dans l'industrie, nous en avons sauvé 3" a-t-il affirmé hier dans un entretien aux Echos. Mais d’autres dossiers chauds sontsur le feu comme le papetier Arjowingins dans la Sarthe sans repreneur, ou les Fonderies du Poitou et Saint-Jean-Industries, deux sous-traitants automobiles. Des entreprises qui représentent 800 emplois au total. En redressement judiciaire, la justice doit décider de leur sort prochainement.
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