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RCF Israël Nisand : 30 ans de médiation pour parler de sexe aux ados
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Israël Nisand : 30 ans de médiation pour parler de sexe aux ados

Un article rédigé par BB - RCF Alsace, le 10 avril 2024  -  Modifié le 10 avril 2024
Le Grand Entretien · RCF Alsace · Lorraine Nancy · Jerico Moselle Israël Nisand : 30 ans de médiation pour parler de sexe aux ados

La sexualité des jeunes est de plus en plus dictée par les codes de la pornographie. Un constat que partage Israël Nisand, professeur de gynécologie obstétrique à l'université de Strasbourg. Il vient de sortir le livre Parler sexe : comment informer nos ados (édit. Grasset) dans lequel il raconte son expérience en tant qu’intervenant dans les écoles. Au début des années 90, face au constat d’une ignorance des adolescents sur leur propre sexualité, il franchit pour la première fois les portes d’une école. Depuis, il n’a cessé de témoigner et de les informer pour contrer une sexualité formatée et machiste. Mais si la loi de 2002 impose de telles interventions en classe, le chemin est encore long pour que l’éducation à la vie sexuelle et affective soit réellement appliquée dans tous les établissements. 
 

© RCF Alsace :  Israël Nisand © RCF Alsace : Israël Nisand

RCF Alsace : Quelle est la genèse de l'écriture de ce livre? Pourquoi vous l'avez écrit et surtout pour qui?

Israël Nisand : J'ai surtout pensé aux parents qui se trouvent démunis face aux questions qui peuvent survenir à l'adolescence. J'ai pensé aux enseignants et j'ai pensé à cette grande absence de la parole des adultes auprès de nos jeunes, remplacée hélas par des images obscènes, perverses et transgressives. Or, nos ados ont besoin d'informations. Cela nuit d'abord aux femmes. Comme je suis gynécologue, c'est ma préoccupation première. Quand il n'y a pas d'information, c'est les femmes qui payent l'addition.

RCF Alsace :  Dans votre livre, vous expliquez que ce n'est pas le rôle des parents de parler d'éducation sexuelle. C'est plutôt à l'école. Pourquoi?

Israël Nisand : Les parents sont indispensables pour l'éducation aux interdits.  Nous, les humains, nous avons plein d'interdits en matière de sexualité. On ne se touche pas devant tout le monde, on ne couche pas avec son père, on ne couche pas avec sa mère. On a de nombreux interdits qui nous permettent de vivre ensemble. Ce sont les parents qui promeuvent les interdits. Et la morale d'une famille n'est pas la même que la morale d'une autre famille. Et quand cette éducation n'est pas faite par les parents, c'est irrattrapable. En revanche, quand l'enfant s'approche de l'adolescence et de sa puberté, il tourne son regard vers des objets sexuels secondaires. Il a l'impression de tromper ses parents. Il a peur de les décevoir, il les protège et il se ferme. Les parents sont les derniers au courant et ils ont besoin d'aide à ce moment-là. Ils ont besoin de l'aide de tiers. Mais je comprends la réticence des parents de confier cette éducation à des tiers parce qu'il faut que les tiers soient de qualité.

RCF Alsace : Depuis 2002, une loi impose des temps d’éducation sexuelle et affective en classe, à raison de trois séances annuelles au collège et au lycée. Qu'est ce que vous pensez vous d'une telle mesure? Elle n'a pas l'air d'être énormément appliquée aujourd'hui…

Israël Nisand :  Je suis favorable à ce que cette loi soit appliquée dans son entièreté. Dans la première partie, vie affective, on se respecte soi même, on respecte l'autre, on apprend cela. Puis quand la sexualité survient, même dans les fantasmes et dans les rêves, l'enfant se ferme par rapport à ses parents, il se ferme par rapport aux enseignants et c'est normal. Il faut des intervenants extérieurs et en plus des endroits où il puisse aller tout seul pour aller consulter, pas pour qu'on l’examine, mais pour pouvoir poser des questions personnelles dans le huis clos d'une consultation. Pour moi, la juxtaposition de deux lois que nous n'appliquons pas  (la loi sur la vie affective et sexuelle et la loi sur la protection des mineurs) donne un effet de ciseaux et met nos enfants devant une véritable barbarie. Pas de parole des adultes, mais des images faites par des adultes pour des adultes que nous envoyons à nos enfants.

 


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Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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