Dimanche 11 janvier 2015, des millions de Français à travers toute la France avaient alors participé à des marches républicaines pour dire non au terrorisme, non à la haine, et oui à la liberté d’expression. Jean-Marie Destrée faisait partie de cette mobilisation. Délégué général de la Fondation Caritas, fondateur du Fonds du 11 Janvier, il a alors l’intuition qu’il se passe quelque chose et qu’il faut en quelque sorte transformer l’essai pour que la jeunesse ne soit plus tentée par le terrorisme et la radicalisation.
"Si je reviens au soir de la manifestation, rentrant chez moi, je me suis dit avoir fait mon devoir de citoyen, mais est-ce qu’il n’y avait pas alors quelque chose à faire demain ? Je suis dirigeant d’une fondation qui travaille dans le lien social, dans la pauvreté, dans l’exclusion. J’ai pris mon téléphone et j’ai appelé quelques collègues engagés dans d’autres fondations. Et nous avons essayé de faire route ensemble, de chercher ensemble, réfléchir et mettre de l’argent pour soutenir des projets, et savoir ce qu’il faudrait faire" explique-t-il.
Lutter contre la pauvreté, contre l’exclusion. On pourrait se demander quel est le lien avec les attentats, et qu’est ce que le Secours catholique vient faire là-dedans. "Dans l’associatif, on est tous des tisserands du lien social, on est tous engagé pour favoriser le vivre ensemble. Nous nous sommes tous pris une claque énorme après ces attentats. Et nous nous sommes demandé ce que l’on pouvait faire, dans le cadre d’une société où les riches deviennent plus riches, et les pauvres encore plus pauvres. Les attentats nous ont menés à des champs que l’on connaissait mal : la laïcité, l’esprit critique" ajoute Jean-Marie Destrée.
"C’est une crainte forte de voir notre pays se déchirer. Nous voyons ces sociétés internationales qui s’effilochent. Et on ne veut pas ça pour la France. Nous avons un pacte républicain, une formidable devise au fronton de nos mairies. Nous qui sommes des agents du lien social, nous pouvons apporter notre goutte d’eau comme le colibri" lance encore Jean-Marie Destrée, qui précise que le décrochage de la jeunesse est un "danger majeur". "Nous avons été frappé par le nombre de jeunes qui au fil du temps partaient en Syrie".
Développer l’esprit critique des jeunes, lutter contre le racisme, voila les missions que se donne le Fonds du 11 janvier, bien avant même d’évoquer le terme de déradicalisation, qui ne fait pas partie des prérogatives de cette institution, précise Jean-Marie Destrée. "Nous avons de beaux acteurs historiques : la Licra, le Mémorial de la Shoah, qui font un travail extraordinaire. Il faut reprendre ce travail. On est dans une société qui se radicalise à nouveau, et c’est dans ce champ qu’il faut refaire un travail autour de la laïcité. L’idée est de faire de ces jeunes des citoyens actifs, acteurs de leur vie, qui ne se laissent pas embobiner" estime-t-il.
Un combat de longue haleine, contre un phénomène qui ne finira pas, analyse Jean-Marie Destrée. "Ce serait illusoire de penser que l’on va en finir. Mais prenons conscience que nous sommes dans une société qui se polarise de plus en plus. Nous devons retravailler du projet collectif, chacun à sa place, dans notre société. Chacun doit pouvoir s’exprimer dans le respect de l’autre, et dans le respect de la loi. Et ces jeunes ont besoin de se sentir utiles. Nous devons rendre de l’espoir aux jeunes" conclut-il.
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