La volonté de l’exécutif est d’avancer vite sur cette technologie, incontestablement très prometteuse pour les connexions, le téléchargement, la circulation accélérée des données sur Internet, en transformant en secondes, les minutes de la 4G. Le président de la République est donc lui-même descendu dans l’arène, faisant lundi dernier de ceux qui questionnent les aspects sanitaires et démocratiques de cette avancée annoncée, les partisans d’un retour à la lampe à huile et des sortes d’Amishs en puissance.
Devant un centaine d’entrepreneurs de la « French Tech » réunis à l’Elysée, cette démonstration ne brillait vraiment pas par la qualité de son argumentation, toute entière appuyée sur la dimension économique du débat : les avantages que l’Europe toute entière pourrait tirer de ces avancées et ce à quelques jours (le 29 septembre) du début de l’attribution de ce fabuleux marché aux grands opérateurs.
Mais le chef de l’Etat s’est bien gardé de s’aventurer sur le front politique… Il avait été ouvert par les 70 élus écologistes et de gauche qui, dimanche dernier faisaient valoir dans le JDD, quelques arguments en faveur d’un moratoire des décisions sur ce sujet jusqu’à la mi-2021. Résumons-les rapidement et il est vrai que ces arguments chahutent un peu la vision présidentielle de la modernité. Doit-on poursuivre de telles avancées sans une solide étude d’impact, sans consultation préalable, sans avancée décisive sur la réduction de la fracture numérique (la fibre en zone rurale et le déploiement de la 4G) là où le bilan des fournisseurs d’accès n’est pas reluisant et sans interroger aussi le bilan énergétique de l’extension de cette technologie ?
A vrai dire ces questions ne sont pas nouvelles. Elles n’appartiennent pas en propre aux écologistes. D’autres, scientifiques et politiques, les ont déjà posées. Est-ce alors l’appât des gains sonnants et trébuchants attendus de la 5G qui provoque chez ses partisans des élans aussi déterminés ? Pour accéder à cette technologie, il faudra par exemple changer de smartphone. Il y a là tant d’intérêts particuliers en jeu que le débat sur l’intérêt général devient difficile. Alors que comme le dit très justement le philosophe et sociologue Bruno Latour, risque et précaution vont dans le même sens : « À cause de l'ubris moderniste, nous avons perdu le sens de l'action commune, celle où l'attention et le risque vont de pair. C'est parce qu'on risque beaucoup qu'il faut faire très attention. C'est parce qu'on est très attentif que l'on peut prendre beaucoup de risques ».
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