Dédiée au raffinage de pétrole brut jusqu’en 2015, l’usine Total de La Mède, près de Marseille, a été, depuis, convertie en unité de production de biocarburants à partir de biodiesel pour devenir l’une des plus grandes bio-raffineries d’Europe. A L’origine, il était question de traiter 650 000 tonnes par an d’huiles végétales usées pour produire du biocarburant.[1]
Mercredi dernier, Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique et solidaire a autorisé, par l’intermédiaire du préfet des Bouches-du-Rhône, le groupe Total à exploiter cette unité. De fait et dès cet été, Total importera au moins 300 000 tonnes d’huile de palme par an, soit une augmentation de 36 % des importations françaises de cette matière première ! Sans parler de l’absurdité des biocarburants qui entrent directement en concurrence avec la production alimentaire, tant en France que dans le monde - songez un instant que les pays riches utilisent les végétaux cultivés sur les terres agricoles pour faire avancer leurs voitures alors qu’un tiers de l’humanité peine à se nourrir - plus personne n’ignore les ravages d’Elaeis guineensis - le palmier à huile - sur les écosystèmes des territoires où il est désormais cultivé intensivement, principalement en Indonésie et en Malaisie.
Dans son plan climat présenté il y a moins d’un an[2], Nicolas Hulot déclarait pourtant vouloir mettre un terme à l’incorporation d’huile de palme dans les carburants, comme c’est actuellement le cas pour 75 % des quantités importées. Pour le reste, en France, on retrouve de l’huile de palme dans 80 % des produits alimentaires industrialisés et 20% des produits de beauté.
C’est que la France vend des armes aux 2 principaux pays producteurs d’huile de palme. Si leurs exportations vers la raffinerie Total de La mède devaient être entravées au nom de la sauvegarde de la biodiversité, c’est la commande de 18 avions Rafales que la Malaisie menace d’annuler.
Certes, « on ne peut pas tout obtenir du jour au lendemain », se défend le ministre, visiblement à court d’arguments ; comprenez par là, la quantité d’huile qu’il faut accepter d’injecter dans le système… Sauf qu’il faut rappeler au ministre que nous sommes déjà demain ! Et qu’à ce rythme, ce sont les forêts primaires, les communautés villageoises et les derniers ourang-outans et gibbons qui les habitent qui disparaissent. En rafale. Si Nicolas Hulot veut conserver son crédit auprès de l’opinion publique et continuer à mettre son énergie au profit de la biodiversité, il devient urgent, pour lui, de cesser d’apparaître comme la caution d’un Gouvernement qui ne manifeste visiblement aucun intérêt pour les enjeux écologiques, et de claquer la porte. Si possible, avec fracas. Car là, c’est la Total !
[1] https://www.usinenouvelle.com/article/total-devient-producteur-de-biocarburant-a-la-mede.N325313
[2] juillet 2017
RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !