La COP 29 aura lieu du 11 au 22 novembre à Bakou, capitale de l'Azerbaïdjan. Le rendez vous annuel de l’ONU réunira les représentants de près de 200 pays pour discuter de l'avenir climatique. Pour Laurent Guillemin, l’événement reste trop peu productif. Cet adjoint bordelais à l’Énergie a toutefois décidé de s'y rendre en vélo électrique. Un voyage entamé le 7 octobre dernier. Entretien.
RCF : Pour quelles raisons un adjoint à la mairie de Bordeaux en vient à décider de partir à vélo vers l'Azerbaïdjan ?
Laurent Guillemain : Tout d’abord, je précise que je ne pars pas en tant qu’adjoint. J'ai mis en suspens mes indemnités d'élus et mes délégations justement pour me sentir très à l'aise en faisant ce petit voyage complètement "perso". Je ne représente pas Monsieur le Maire de Bordeaux lors de ce voyage. Je pars du principe que les habitants de Bordeaux n'ont pas à payer mes impôts personnels.
À l'origine, je voulais aller à la COP 29 en vélo parce que la COP, pour moi, c'est un rendez-vous génial. C'est le rendez-vous du climat et de l'environnement annuel devant toutes les grandes institutions, les grands décideurs de ce monde.
Et en fin de compte, cette conférence est sous-cotée. Les gens y vont, atterrissent sur le tarmac, font une photo, ils s'en vont et rien ne se fait. Pour information, rien ne se fait depuis Kyoto 92. On n'a pas encore mis en place ce qui y a été voté et ce qui y a été accepté. Certes, la France a décidé de réduire le CO2, ainsi que l'Allemagne... Individuellement, tout le monde le fait plus ou moins. Mais factuellement, le travail collectif ne se fait pas.
J'ai donc voulu aller à la COP 29 de façon un petit peu "provoc" et taquine en y allant à vélo. N'étant pas un grand sportif, je vais y aller en vélo électrique et en binôme, car c'est sympa de partager la route.
RCF : Vous avez dit "Au départ, c'était mon projet d'aller à la COP". Ce n'est plus le cas ?
Laurent Guillemin : Non, ce n'est plus le cas parce que pour des questions géopolitiques et de sécurité, l'Azerbaïdjan se réserve le droit désormais de procéder à des arrestations arbitraires de tout ressortissant français, avec ou sans visa.
Je vais donc me rendre à la frontière entre la Géorgie et l'Azerbaïdjan, et faire ce que j'appelle "la route de l'Énergie". Je vais rencontrer chacune des personnes avec qui je souhaite m'entretenir à Bordeaux, Agen, Toulouse, Béziers, Arles, Marseille, Valbonne, Monaco...
Et on va discuter : Est ce que tu sais d'où vient ton énergie ? Est ce que tu connais la proportion d'énergies renouvelables sur ton territoire ? Qu'est ce que tu fais ? Qu'est ce que tu saurais faire ?
Un kilowattheure c'est invisible. C'est pas comme un déchet, comme de l'eau ou une fuite d'eau qui eux, se voient. Un kilowattheure est invisible, donc c'est très compliqué à appréhender, sauf quand il brille. C'est pour ça que tout le monde fait un grand forcing sur les lumières, les lumières, les lumières, ce qui est une très bonne chose. Mais en soi, c'est une toute petite partie de la consommation d'énergie de notre monde.
RCF : Finalement, vous ne déposez pas véritablement votre casquette d'adjoint à l'énergie ?
Laurent Guillemin : Je réitère que je dépose bien ma casquette d'adjoint. C'est une certitude.
Mais toutes études, mes deux diplômes, ma vie personne, ma vie professionnelle, ma vie d'adjoint au Maire de Bordeaux, ma vie de commandant de l'armée de l'air ont été dédiés à l'Énergie. Je suis ingénieur en Énergie, je me suis spécialisé en réduction de la consommation de l'eau et de l'énergie dans les bâtiments sur le territoire. J'avais une société de conseil en Énergie. Je suis adjoint effectivement en charge de l'Énergie.
RCF : Justement, est ce que vous ne faites pas une entaille à votre mandat en délaissant les bordelais pendant 7 semaines ?
Laurent Guillemin : Ça été perçu comme ça par certains, ce qui m'a fait beaucoup de peine.
Je mets en "stand-by" mes indemnités d'élu, tous mes dossiers sont à jour et carrés. Quelqu'un va prendre la délégation de signature, mon assistante restera en contact avec moi, aura accès à tous mes dossiers et on s'entretiendra entre 19h30 et 20h. Je ne m'évapore donc pas.
RCF : Pas de culpabilité ?
Laurent Guillemin : Aucune. Je ne pars pas 7 mois, pas 7 ans, mais 7 semaines dans les grandes lignes. Et durant les quatre dernières années, je n'ai pris que deux semaines de congés par an. Je pense être "fair-play", sachant que je finance en grande partie ce projet à titre personnel.
RCF : À quoi vous attendez- vous lors de cette aventure ?
Laurent Guillemin : Quand on s'attend à quelque chose, on s'expose éventuellement à de la déception.
Sans être un naïf optimiste, je suis d'un tempérament assez positif. Une crevaison, ça peut être un moment pour se poser, où tout peut arriver. Il n'y a pas de hasard, selon moi.
Je ne m'attends donc à rien. J'aimerais évidemment que "la route des énergies" prenne une tournure qui me plaise. Mais je n'ai pas d'inquiétude. Je suis quelqu'un de très créatif, avec beaucoup d'aptitudes au changement, très résilient.
RCF : Vous êtes aussi l’adjoint en charge des Cultes et protestant vous-même. Est ce que votre foi intervient dans ce projet ?
Laurent Guillemin : J'ai foi du fait qu'on ait tous en nous une petite lumière qui nous amène, qui nous pousse vers Dieu, vers l'avant.
J'ai un petit credo : cette petite phrase de Voltaire qui dit que "dans une avalanche, aucun flocon ne se sent responsable." Je me dis que je fais partie des flocons. Une avalanche n'est pas forcément négative pour un flocon. Une avalanche peut être "super bien", juste une glissade. Je suis un des flocons faisant des avalanches de choses positives. Si on n'est pas là sur Terre, on est là pour quoi ?
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