C'est un dossier sensible, qui inquiète aussi bien les militants de la laïcité que les responsables de cultes. Le chantier de la réforme de la loi de 1905 avait été annoncé dès le mois de juin 2017 par Emmanuel Macron et maintes fois repoussé. L’an dernier, le président avait renoncé à prononcer un grand discours sur ce thème. Mais la réforme est désormais dans les tuyaux du gouvernement.
L'objectif initial de la loi était de mettre fin au concordat, signé en 1801, entre Napoléon Bonaparte et le pape Pie VII. Avec la mise en place de la IIIème République, s'oppose en France deux conceptions sur la place des Églises dans la société pendant presque 25 ans, qui aboutira à la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l'Etat qui garantit aujourd'hui la liberté religieuse des Français.
Depuis sa mise en place, cette loi a été régulièrement modifiée. Le but de la prochaine révision est de mieux encadrer le financement de l’islam en France en réduisant les investissements venus de l’étranger. Les communautés et organisations musulmanes de France bénéficient de financements étrangers, qui sont aussi un levier d'influence idéologique. Après des "assises territoriales de l'islam" organisées à la demande de l'ancien ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, une série de consultations auprès des représentants de culte et des mouvements laïques a débuté.
C'est donc la piste d'une révision de la loi 1905 qui se dessine. Le CFCM, le conseil français du culte musulman, a été reçu lundi. La réunion ne s’annonçait pas sous les meilleurs auspices. Mais Anouar Kbibech, vice-président du CFCM et président du rassemblement de France des musulmans, est sorti rassuré de sa rencontre avec Emmanuel Macron.
Concrètement, la réforme pourrait consister à rendre plus attractif le statut d'"association loi 1905", c'est-à-dire les associations cultuelles. Actuellement, la plupart des associations de fidèles musulmans optent pour le statut d'association loi 1901, qui offre plus de souplesse sur l'utilisation des fonds. Une nouvelle obligation pourrait être imposée aux deux types d’associations : la déclaration des dons provenant de l’étranger, au-delà de 10.000 euros.
Mais toucher à cette loi de 1905, symbole de la laïcité à la française, suscite des réserves. Et notamment de la part de militants laïques. Une pétition signée par 113 personnalités appelle à ne pas réformer cette loi, estimant que les outils légaux permettant de répondre "aux dérives intégristes de l'islamisme politique" existent déjà par ailleurs.
Une réunion avec l'ensemble des responsables de culte est prévue à l'agenda du chef de l'État jeudi 10 janvier. Eux aussi s'inquiètent d'une modification de la loi de 1905. Le pasteur François Clavairoly est le président de la conférence des responsables de cultes en France. Il n'est pas opposé à une modification mais il attend de voir en quoi cela va consister.
La Conférence des Evêques de France (CEF), de son côté, s'inquiète que cette révision ne vienne ranimer de vieux démons dans notre société où la question de laïcité est épidermique. C'est ce que nous avait confié Mgr Olivier Ribadeau-Dumas, secrétaire général de la CEF, en marge de l'Assemblée plénière des évêques à Lourdes au moins de novembre dernier.
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