Fini la marque "Monsieur Patate", jouet culte du groupe Hasbro. Le fabricant a annoncé jeudi 25 février qu'il allait commercialiser une famille patate non genrée, mais a précisé que les jouets genrés eux-mêmes le resteraient. Comment travaillent les marques à l’heure où la société tend vers plus d’égalité femmes-hommes ? Léa Lejeune, journaliste à Challenges publie "Féminisme Washing, quand les entreprises récupèrent la cause des femmes" (éd. Seuil).
Si "Monsieur" et "Madame Patate" laissent place à une famille non genrée, c’est parce que "c’était un jouet caricatural", selon Léa Lejeune. "Toutes les marques se rendent compte aujourd’hui qu’il y a un changement de ce qu’on attend des hommes et des femmes", poursuit la journaliste qui prévient tout de même que "ces marques font aussi ça pour faire le buzz et conquérir des parts de marché".
Toutefois, il faut se réjouir de ces changements selon Léa Lejeune. "Le fait que ces images circulent, les idées féministes circulent et ça c’est positif", affirme-t-elle, préférant observer le verre à moitié plein. Mais "le côté négatif c’est que les entreprises font de la com’ et puis c’est tout. Elles n’ont pas réfléchi à changer la manière dont elles traitent les femmes à l’intérieur de l’entreprise ou l’égalité des salaires".
Pendant son enquête, qui a abouti à son livre, Léa Lejeune a été confrontée à beaucoup d'éléments de langage. Mais une entreprise tire son épingle du jeu au niveau de l'égalité femmes-hommes dans l’entreprise : L’Oréal. "C’est une entreprise qui fait très attention aux inégalités en son sein, aux inégalités de salaire. Des chercheuses le prouvent. Ils essayent de favoriser les congés paternité. C’est des exemples concrets d'avancées", commente la journaliste.
Aujourd’hui de nombreuses marques "essaient de changer dans leurs représentations. Le fait de stéréotyper autour de caractéristiques féminines fortes ça va plutôt leur faire perdre de la clientèle". Mais parfois cette volonté de changer les représentations des femmes peut rajouter des injonctions. "Déjà qu’il fallait être belle, s’épiler, maintenant il faut aussi être forte, indépendante, gagner bien sa vie… C’est énorme pour les femmes de se représenter tous ces objectifs", affirme Léa Lejeune.
Parmi toutes ces marques, les consommateurs peuvent avoir du mal à s’y retrouver. "Il faut s’informer, lire des articles. Il faut se renseigner avant d’acheter. L’idée c’est d’être plus raccord avec ces valeurs, en consommant des produits qui nous correspondent mieux", précise la journaliste.
"Les idées [féministes] dans la société sont déjà arrivées loin, cependant c’est encore débutant dans le marketing et les entreprises. Cette réflexion dans les ressources humaines n’a pas encore été posée. Le féminisme c’est pas un effet de mode, c’est fait pour durer", conclut Léa Lejeune.
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