Qui se souvient de Populorum progressio ? Le texte que le pape Paul VI a publié le 26 mars 1967 est semble-t-il tombé pour beaucoup aux oubliettes. Il faut pourtant relire l'encyclique, celle où le chef de l'Église catholique encourageait l'Église, mais aussi les États et les associations, à œuvrer en faveur des pays du tiers monde, au nom de "tout homme et de tout l'homme". Certes, 50 ans après on parle de relations Nord-Sud et la réalité socio-économique de notre planète a bien changé. Mais Populorum progressio a initié un élan dont les effets sont toujours visibles aujourd'hui. Et aussi, c'est l'un des textes phares de la doctrine sociale de l'Église catholique (ou DSE), qui, elle aussi mérite d'être connue ou redécouverte.
50 après Populorum progressio, l'idée de développement a pris un autre visage. Avec la mondialisation, la crise écologique, ou l'intensification des migrations. Mais l'intuition de Paul VI, a fait naître un élan. Encouragés par ce texte, des chrétiens ont fait le choix de consacrer 1% de leurs revenus à la solidarité internationale. Et de nombreuses personnes déjà engagées auprès des Scouts et Guides de France, de la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC) ou de l'Action catholique ouvrière (ACO), ont décidé de se rassembler au sein du Comité catholique contre la faim et pour le développement-Terre Solidaire (CCFD-Terre Solidaire), qui soutient aujourd'hui plus de 697 projets initiés par des acteurs locaux dans 66 pays.
Un texte dont il faut comprendre qu'il est né dans l'élan de Vatican II (1962-1965), événement majeur de l'Église du XXè siècle que l'on a qualifié d'"Aggiornamento", c'est-à-dire de mise à jour ou de mise à niveau. Un concile qui a vu une Église catholique centrée sur son dispositif institutionnel s'ouvrir à "l'ensemble des croyants", comme l'explique Xavier Ricard Lanata. Il parle d'un "geste libérateur" qui a "ouvert les vannes de l'auto-organisation de la société civile". Notons qu'au sein de l'Église elle-même, le Conseil pontifical Justice et Paix a été créé dès 1967, décliné par la suite dans les épiscopats du monde entier.
"Aujourd'hui, le fait majeur dont chacun doit prendre conscience est que la question sociale est devenue mondiale", lit-on en introduction de l'encyclique. "Ce à quoi invite Populorum progressio c'est à un élargissement de la solidarité", note Jean Merckaert. "Les chrétiens ont pris conscience que la charité ce n'est pas uniquement ceux qui sont en bas de chez soi mais ceux qui sont à l'autre bout du monde aussi."
En Amérique latine, à la suite de Populorum progressio il y a eu la fameuse Conférence Générale de l'épiscopat latino-américain, à Medellín en 1968, où les évêques du sous-continent ont fait le choix de l'option préférentielle pour les pauvres, donnant naissance à la théologie de la libération. D'ailleurs le Centre Bartolomé de las Casas de Cusco (Pérou) est né de cet élan, en 1968 : celui à qui l'on doit le superbe livre "Blanche est la Terre" (éd. Seuil), de Xavier Ricard Lanata. Un récit initiatique où l'auteur raconte ses aventures dans des sociétés de bergers des Andes.
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