Notre mode de développement a certainement un rôle dans la pandémie actuelle. Pour autant, ne confondons pas le principe de la mondialisation et notre mode de développement. Ce sont les errements de notre forme actuelle de développement qui privilégient trop systématiquement la rentabilité financière sur tout autre type de considération : le court-termisme sur les enjeux de long terme, le privé sur le commun… qui sont pour partie responsables de cette crise sanitaire.
Nombreuses sont les voix en France à penser qu’il y a aujourd’hui une crise structurelle du capitalisme tel qu’il fonctionne. Mais cette perception, et plus encore ce vocable, n’est pas nécessairement partagé par nos partenaires européens. En Pologne, par exemple, même après la crise financière de 2008, la croissance économique est restée positive. Difficile de parler de crise de modèle. Pourtant, la montée en puissance des problématiques écologiques pourrait changer la donne. Le fait qu’une conservatrice allemande fasse de celles-ci la priorité de son mandat à la tête de la Commission montre que les équilibres ont bougé.
Justement, 11 États membres - dont la France - ont signé une lettre appelant à utiliser le Green Deal comme colonne vertébrale de la relance. N’est-ce pas le signe que l’Europe est en train d’opérer sa transformation ? Les appels se multiplient pour que cette priorité de la nouvelle Commission européenne ne soit pas sacrifiée sur l’autel de la nécessaire relance économique. Et si le risque existe effectivement qu’on relègue à plus tard la transformation écologique de nos sociétés, les investissements que nous faisons aujourd’hui dans nos infrastructures énergétiques dureront au moins 30 ans.
Pour autant, il est illusoire de se dire que le seul Green Deal permettra à l’Europe de se réinventer. Ses hypothèses sont bien trop fragiles. La croissance verte n’existe pas encore et pourrait bien n’être qu’une chimère. Au-delà, la transformation écologique ne doit pas masquer les autres défis que nous devons relever : sociaux, économiques, démocratiques, stratégiques. Or, l’UE doit encore démontrer sa capacité à articuler ces problématiques. Il faudra bien que l'Europe réinvente son modèle de développement. Car, le monde change. Un mouvement de relocalisation s’accélère. Et, le niveau européen devra prouver sa valeur ajoutée face à l’hypothèse de relocalisations nationales. C’est donc bien la réinvention de son modèle, y compris de ses solidarités, que l’Europe doit entreprendre. Mais la route est encore longue.
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