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L’incendie de l’île d’Amsterdam menace un trésor de biodiversité

L’incendie de l’île d’Amsterdam menace un trésor de biodiversité

RCF, le 18 février 2025 - Modifié le 17 mars 2025
Le dossier de la rédactionL'incontrolable incendie de l'île française d'Amsterdam

Depuis plus d’un mois, un feu de brousse fait rage sur l’île française d’Amsterdam. C’est l'une des plus isolées du monde. Ce caillou est perdu au sud de l’Océan indien à près de 3 000 km de la Réunion sur la route de l’Antarctique. Ce feu hors de contrôle inquiète particulièrement la communauté scientifique en raison de la présence de nombreuses espèces menacées. 

L'île d'Amsterdam abrite d'importantes colonies d'oiseaux dont l'albatros d'Amsterdam espèce endémique. Crédit photo : Emile Loreaux / Hans Lucas.L'île d'Amsterdam abrite d'importantes colonies d'oiseaux dont l'albatros d'Amsterdam espèce endémique. Crédit photo : Emile Loreaux / Hans Lucas.

Le feu d'ampleur exceptionnelle s'est déclaré le 15 janvier. Or l’isolement de l’île d’Amsterdam fait qu’aucun moyen de secours incendie ne peut y être déployé. Depuis La Réunion, 16 jours de mer sont nécessaires pour l’atteindre. L’île Amsterdam dépend des TAAF, les terres australes et antarctiques françaises. Elle abrite depuis 1950, la base scientifique permanente Martin-de-Viviès. 

La mission scientifique sur place évacuée 

Les 31 personnes de la mission scientifique présentes sur place ont d'abord tenté de lutter contre les flammes. Mais ils ont dû renoncer, confrontés au vent violent à un terrain sec et des flammes de plusieurs mètres de hauts. Ils ont dû être évacués en urgence. "Nous sommes dans l'hémisphère sud en plein milieu de l'été. La végétation est relativement sèche. Le feu a pris à un moment où il y avait des vents relativement violents. Ce qui a attisé les braises et ce qui a poussé relativement rapidement l'incendie" explique David Renault, directeur scientifique à l'Institut polaire français Paul-Emile Victor. Dans ce district subantarctique, les vents soufflent régulièrement de 30 km/h à 40 km/h. Selon les images satellites, le feu a ravagé plus de la moitié de l’île d’une surface totale de 58 km2 environ. L’île d’Amsterdam ne possède pas de sources, ni de ruisseaux, la seule eau disponible provient de la récupération des pluies. 

Amsterdam fait partie d'une réserve naturelle classée au patrimoine de l'UNESCO. 

Comme ses voisines de Saint-Paul, Crozet ou Kerguelen plus au sud, l’île abrite une biodiversité unique en son genre. Coté végétation, on y trouve de grandes herbes, des mousses des lichens et quelques arbustes en particulier le Phylica. "C'est un arbre endémique, c'est-à-dire qui n'existe que là. On avait monté une pépinière avec un plan de réimplantation, avec succès d'ailleurs. Malheureusement, on a vu que la pépinière avait brûlé, donc il va falloir tout reprendre à zéro" explique la navigatrice Isabelle Autissier, également administratrice des TAAF. Dans cette zone de l'océan Indien où l'on dénombre très peu d'îles, Amsterdam joue un rôle de refuge. 

Elle héberge ainsi une faune très spécifique et souvent menacée. On y trouve la troisième population mondiale d’otarie à fourrure et de multiples colonies d’éléphants de mer. Outre les mammifères marins, il y a aussi de très importantes colonies d’oiseaux. L’île héberge par exemple 84 % de la population mondiale d'albatros à bec jaune. Les scientifiques craignent aussi, pour son cousin l'albatros d'Amsterdam. Il n'est présent que sur cette île, avec 200 couples recensés. "Des espèces emblématiques sont déjà menacées, et là elles le sont encore plus avec cet épisode. Pour l'albatros d'Amsterdam, on allait entrer dans la période de reproduction. Il y a des craintes pour la biologie de la reproduction et donc pour la démographie des populations" souligne David Renault.

Un isolement propice aux recherches scientifiques 

L’isolement d’Amsterdam fait qu’elle a été choisi dès les années 50 pour mener toute sorte de recherches scientifiques. Depuis 45 ans, les capteurs de la station scientifique Martin de Viviès analysent la concentration dans l’air des gaz à effets de serre. C’est l’un des deux sites les plus isolés de la planète pour collecter ce type de données. "Autant nous disposons de pas mal de points de mesure dans l'hémisphère nord, autant dans l'hémisphère sud, les opportunités de sites de mesure sont rares. L'île d'Amsterdam est le seul point de mesure de l'océan Indien" souligne Michel Ramonet, chercheur au CNRS au Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement."Or c'est important parce que l'océan Indien joue un rôle assez important dans le cycle du carbone puisqu'il absorbe une part significative de nos émissions de CO2". 

Un mission d'évaluation en route vers l'île d'Amsterdam

Ironie, l’île d’Amsterdam est rattrapée par le dérèglement climatique. Si des témoignages de navigateurs il y a quelques centaines d’années évoquaient des feux sur l’île. Cet incendie de grande ampleur a sans doute été accentué par la sécheresse. "Les sécheresses sont de plus en plus longues, à tel point d'ailleurs que ça commençait à poser des problèmes pour l'alimentation en eau de la base, qui récupère de l'eau de pluie" constate Isabelle Autissier. C'est la première fois depuis 75 ans que l'île est laissée déserte. Une mission spéciale est en route à bord d’un patrouilleur de la marine nationale le Floréal avec des sapeurs-pompiers du SDIS de la Réunion, mais aussi des techniciens et logisticiens des TAAF. Ils auront pour objectif de dresser un premier état des lieux des dégâts sur la base scientifique et tenteront de déterminer l’origine de l’incendie.

 

Le dossier de la rédaction © RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Le dossier de la rédaction
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