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L'observatoire alsacien du CREDIR s'insurge contre la surdose numérique

Un article rédigé par M.-L.W. - RCF Alsace, le 23 mai 2024 - Modifié le 28 mai 2024
Les Trois Questions · RCF AlsaceL'observatoire alsacien du CREDIR s'insurge contre la surdose numérique

Le  CREDIR, une ONG de prévention du burn-out professionnel établir des liens entre la surdose digitale, l'épuisement, la désocialisation, et la hausse de la violence. Dans un livre paru début mai, son fondateur Jean-Denis Budin signe un plaidoyer “pour que la surdose numérique détruise moins de vie”.

© RCF Alsace : Jean-Denis Budin© RCF Alsace : Jean-Denis Budin

RCF Alsace : Depuis sa fondation en 2012, le CREDIR par votre voix publie un livre par an. Cette année, vous publiez Le Cri-rêve des épuisés: Pour que la surdose numérique détruise moins de vies (Ed. Leduc) Y a-t-il eu un élément déclencheur particulier pour aborder ce thème ?

Jean-Denis Budin : Depuis plus de 10 que nous accompagnons des entreprises, nous commençons à observer des phénomènes bizarres dans le monde du travail et au-delà.  La pandémie a quand même changé beaucoup de choses dans le rapport au travail et dans le rapport à la vie personnelle, notamment par rapport à nos rythmes de vie. Nous étions confinés et tout le monde aurait dû s'ennuyer. Les gens se sont rendus compte qu'avec le numérique, on s'ennuyait jamais, ce qui a accentué un petit peu la tendance à la surdose numérique. Aujourd'hui, nous sommes pratiquement à 4 h par jour d'écran, uniquement à titre personnel, en dehors de l'utilisation des écrans pour la vie professionnelle et au détriment du sommeil et de la socialisation. Nous avons commencé à avoir des phénomènes un peu bizarres de violence : violence auto-infligée, avec des tentatives de suicides, mais aussi de violence sur le lieu de travail, avec des gens qui concrètement "pètent davantage un câble".

RCF Alsace : Concrètement, comment ces mauvaises habitudes numériques se répercutent dans le monde du travail ?

Jean-Denis Budin : Une de nos chercheuses a analysé le phénomène. Elle a mis en évidence le fait que quand un cerveau est fatigué, il a davantage de mal à arbitrer ces tendances violentes qui peuvent venir du règne animal. A partir de là, tout s'explique : dans la mesure où l'on dort moins, on ne dort plus assez. Il y a 20 ans, date de création de l'iPhone, les gens dormaient plus. Aujourd'hui, on est à 6 h, il faudrait 8 h.  Nous avons aussi plus tendance à travailler à distance. Dans le télétravail, on est en mode asynchrone : envoyer des messages, moins se parler. Or, c'est en pratiquant les relations sociales au quotidien qu'on va se réguler et apprendre à vivre avec les autres. Sinon, c'est la pente glissante pour réagir trop violemment quand les autres ne font pas exactement ce qu'on voudrait.

RCF Alsace : Depuis 2017, les professionnels devraient toutefois être protégés par la loi de la déconnexion numérique, une règlementation qui date d'avant la pandémie. Cette loi est-elle toujours pertinente ?

Jean-Denis Budin : Pertinente en son temps, cette loi marque un chemin mais ne correspond aujourd'hui plus à la réalité de la santé du cerveau des gens. Il faut faire comprendre aux gens que quand ils font une pause, par exemple dans le cours de leur journée de travail, ils ne vont pas reposer leur cerveau s'ils se mettent sur leur WhatsApp, leur Facebook, leurs jeux vidéo.  Le cerveau a besoin de repos. Il ne fait pas la différence entre la charge du numérique personnelle et la charge du numérique professionnel.  

C'est complètement vain d'imaginer un monde sans ces smartphones. Il va donc falloir apprendre à s'en servir différemment, à faire des pauses et à contrôler ses addictions.


RCF Alsace : Des prises de conscience émergent petit à petit, avec notamment le rapport sur les relations des jeunes et des écrans présenté fin avril par les parlementaires LR, et une proposition de loi pour réguler l'usage des écrans en présence des enfants de moins de 3 ans. Des initiatives pour protéger les mineurs émergent peu à peu, mais rien pour les jeunes adultes.

Jean-Denis Budin : Je crois qu'on fait de grosses erreurs. Il faut vraiment séparer la question des mineurs et la question des majeurs sur les mineurs. Oui, à certains moments, il va falloir en passer par des opérations comme celle-là. Parce que ces mineur n'ont pas besoin de leur smartphone pour payer ou rentrer à la maison. C'est différent pour les adultes. De toute façon, on nous l'a greffé. Il va rester dans nos poches jusqu'à la fin de nos vies. Essayer de contraindre les gens par rapport à leur consommation du numérique est impossible, notamment au niveau des adultes. Ils ont maintenant leur carte de crédit dessus et tellement d'applications que obliger les gens à poser leur smartphone, ce n'est pas possible. En revanche, il faut les éduquer en leur disant il ne faut pas que ça soit non-stop. Il y a des moments qui doivent être sacralisés, comme le repas au restaurant par exemple. C'est complètement vain d'imaginer un monde sans ces smartphones. Il va donc falloir apprendre à s'en servir différemment, à faire des pauses et à contrôler ses addictions. Dans le livre, je propose 23 propositions individuelles, applicables qui servent déjà à mesurer l'ampleur du phénomène dans nos quotidiens.

Jean-Denis Budin donnera une conférence "Pour que la surdose numérique détruise moins de vie" le mardi 28 mai à 18 h 30 dans les locaux du CREDIR, à Kaysersberg. L'entrée est gratuite. 

 


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