Un peu partout en France, la campagne fait rage entre les candidats de droite, de gauche, d’extrême-droite, d’extrême-gauche et du centre. Enfin, si tant est que l’on puisse encore catégoriser les élus par tendances politiques. Car la "circulaire Castaner", très critiquée depuis plus d’une semaine, a justement fait resurgir le débat sur l’utilité des étiquettes politiques des élus.
Le ministre de l’Intérieur demande aux préfets de ne plus attribuer de couleur politique aux candidats déclarés sans étiquette, dans les communes de moins de 9.000 habitants. Concrètement, jusqu’à présent, les préfets disposent en fait d’un panel de nuances politiques qu’ils attribuent, de façon discrétionnaire, aux élus qui n’ont pas déclaré d’étiquette dans les communes de 1.000 habitants ou plus. L’objectif est de pouvoir se faire une idée des tendances nationales et locales, après le scrutin.
Pour l’instant, le système actuel convient à l’Association des maires de France. C’est pour cela que l’AMF n’est pas vraiment convaincue par cette "circulaire Castaner". Philippe Laurent, le secrétaire général de l’association, ne comprend pas pourquoi ce nuançage politique ne débuterait que pour les villes d’au moins 9.000 habitants. Cela reviendrait finalement à ne plus prendre en compte les résultats de plus de 95% des communes de France. Il dénonce même sur RCF une manipulation de la part du gouvernement.
Du côté des élus ruraux, en revanche, le son de cloche est un peu différent. L’AMRF, l’Association des maires ruraux de France, qui ne représente que les communes de moins de 3.500 habitants, soutient plutôt la "circulaire Castaner". Beaucoup d’élus de petites communes demandent, depuis longtemps, de ne pas être associés à une tendance politique un peu contre leur gré. D'après eux, cela ne veut rien dire au niveau des communes rurales. C'est ce que confirme Michel Fournier, le vice-président de l’AMRF, sur RCF.
Ce nuançage politique n’a jamais vraiment eu d’intérêt aux yeux de nombreux élus ruraux. Mais il faut dire, aussi, que ce désamour s’est accentué avec la déroute des partis traditionnels. Aujourd’hui, les candidats aux municipales n’éprouvent, en réalité, pas le besoin d’être soutenus par des partis traditionnels, qui sont assez faibles. Pour Michel Fournier, de l’AMRF, ces structures ne donnent, tout simplement, plus envie.
Par ailleurs, afficher un soutien de la part d’un parti politique traditionnel n’apporte en réalité aucune voix supplémentaire aux candidats. Sauf, peut-être, pour ceux du Rassemblement national. C’est en tout cas l’analyse de Cécile Delozier, experte en médiatraining et conseillère en communication.
Toujours selon Cécile Delozier, les candidats n’ont finalement pas besoin d’afficher ouvertement leur parti de référence, pour se placer sur l’échiquier politique. Car, comme l’explique la conseillère en communication, d’autres moyens permettent aux électeurs de se repérer, presque inconsciemment.
Toujours est-il qu'avec cette circulaire, les perdants des prochaines municipales pourraient finalement bien être les partis traditionnels. Ce sont d’ailleurs les premiers à avoir déposé un recours devant le Conseil d’Etat contre cette "circulaire Castaner". Puisqu’en faisant commencer le nuançage politique à partir des communes d’au moins 9.000 habitants, les plus petites villes, où ces partis étaient jusqu’ici bien implantés, ne seraient plus prises en compte dans les résultats. Ce qui ferait donc mathématiquement baisser les scores des partis traditionnels au niveau national.
Face à cette difficulté, plusieurs enseignants-chercheurs en sciences politiques proposent une sorte de compromis. C'est le cas de Martial Foucault, le directeur du Centre de recherches politiques de Sciences Po. Dans tous les cas, le Conseil d’Etat devrait remettre un peu d’ordre dans tout ça puisqu’il doit examiner la légalité de la "circulaire Castaner" mercredi, dès 11h.
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