L’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER) scrute de près les stocks débarqués par les 7.000 navires français. Plus de 400.000 tonnes de poissons frais au total en 2017. Pour évaluer l’état des ressources, les techniciens de l'IFREMER interrogent les pêcheurs, ils observent les débarquements. Ils ont même parfois des contrôleurs à bord, mais ils croisent aussi ces informations avec les historiques de capture, les caractéristiques biologiques de chaque espèce.
Toutes ces données constituent un bilan pour le moins mitigé. Près de la moitié des stocks, 48% précisément, est exploitée de façon durable c’est-à-dire en laissant aux poissons adultes assez de temps pour se reproduire efficacement. En revanche, 27% sont surexploités, et 25% ne sont pas évalués. C'est ce qu'explique Alain Bizeau, en charge de l'expertise halieutique au sein de l’IFREMER.
En Méditerranée, la situation est également mauvaise, que l'on parle de merlus, de rougets ou encore de sardines. Seul le thon rouge retrouve des couleurs. Pour l’IFREMER, cela s’explique par les mesures de gestion des stocks appliquées depuis 2007. Un stock désigne une espèce dans la zone où elle vit. Les eaux métropolitaines comptent notamment cinq stocks de sole, quatre de cabillaud et selon où ce stock se trouve, il peut faire l’objet de surpêche ou au contraire entrer dans les critères d’une pêche durable. Si l’on prend l’exemple du merlu, il est surexploité dans le golfe du Lion. En revanche dans le golfe de Gascogne, il semble mieux se porter.
Mais d’autres facteurs peuvent aussi expliquer une baisse des stocks. Par exemple si le hareng et le maquereau perdent du terrain depuis trente ans dans la Manche, c’est aussi à cause du réchauffement de la température de l’eau qui a probablement poussé ces espèces à migrer. Mais parmi les causes de cette surpêche on peut inclure la pêche électrique qui vient d’être interdite par l’Europe. C’est en tout cas ce que pense Mathieu Colléter de l’association Bloom, une ONG spécialisée dans la protection des fonds marins.
Quoi qu’il en soit, le bilan en demi-teinte dressé par l’IFREMER est insuffisant si l’on se réfère aux objectifs européens. Les Etats membres de l’Union européenne se sont engagés à atteindre au plus tard en 2020 ce rendement maximal durable. A moins d’un an de cette échéance, moins de la moitié des stocks, 48%, sont exploités de façon durable. Pours Mathieu Colléter, de l’association Bloom, c’est un échec et les responsables de cet échec sont ceux qui se sont fixés cet objectif ambitieux, c’est à dire les Etats européens.
Tout n'est cependant pas noir dans ce tableau et certaines initiatives pourraient contribuer à atteindre les objectifs de pêche durable. C'est le cas à Lorient où l’Ifremer, le Comité des pêches du Morbihan, des entreprises et des universitaires bretons planchent sur un projet qui permettrait d’identifier les poissons à distance.
Concrètement, des capteurs seraient installés dans et à l’entrée du chalut. Ces capteurs permettraient d’identifier exactement et en temps réel les poissons capturés alors qu’actuellement, on n’identifie que des formes vivantes. L’intelligence artificielle au service de la pêche durable. Chercheurs, enseignants et entreprises espèrent mener à bien ce projet d’ici trois ans. Un projet d’1,5 million d’euros financé par France Filière Pêche et le Feamp, un fonds européen.
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