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Olivier Cigolotti "l'Europe c'est la Paix et la sécurité"

Un article rédigé par Stéphane LONGIN - RCF Allier, le 3 mai 2024 - Modifié le 3 mai 2024

Depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie en février 2022 la question d'une armée européenne fait débat. Faut-il créer des forces mutualisées ? La France doit-elle partager sa dissuasion nucléaire avec d'autres états membres ? A l'occasion d'une émission spéciale des radios RCF d'Auvergne et de Drôme Ardèche au Chambon-sur-Lignon le sénateur centriste Olivier Cigolotti, membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, a répondu aux questions de Stéphane Longin.

Olivier Cigolotti est membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées au SénatOlivier Cigolotti est membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées au Sénat

Olivier Cigolotti, l’Europe de la défense semble un objectif difficile à atteindre car il se heurte à une volonté des Etats de garder le contrôle sur leurs armées ?

L'armée, pour une nation, c'est un élément de souveraineté plus difficile à mutualiser que d'autres domaines. Et du coup c’est un vieux serpent de mer…Le général de Gaulle, en 1950 parlait de communauté européenne de défense. Et à l'époque, les États membres n'étaient pas au nombre de 27. Et depuis, à la fois stratégiquement et industriellement, l'Europe de la Défense est restée quelque part un vœu pieux.

Je prends l'exemple de ce qui touche aujourd'hui l'Europe, l'un des plus grands fléaux qui est constitué par le terrorisme. Nous avons eu beaucoup de difficultés en étant leader de la lutte contre le terrorisme en Afrique de l'Ouest pour mobiliser autour des forces françaises, d'autres forces européennes, d'autres états membres pour lutter à la base, à la racine de ce fléau. Alors que l'ensemble de l'Europe est concernée et est touchée par les problématiques de terrorisme.

Mais le conflit entre la Russie et l’Ukraine peut donner un nouvel élan ?

Oui tout à fait. Depuis février 2022, avec l'invasion Russe en Ukraine, si on ne peut pas encore parler d'une Europe de la défense, on peut tout de même parler d'une forme de solidarité, d'une prise de conscience des États membres, que finalement les risques pour l'Europe sont très proches. Ils sont toujours aujourd'hui en Afrique avec le terrorisme mais ils sont aussi sur le flanc oriental de l'Europe.

Olivier Cigolotti, sénateur de la Haute-LoireOlivier Cigolotti, sénateur de la Haute-Loire
Emission spéciale sur RCF : L'Europe de la ruralité et l'Europe de la défenseEmission spéciale sur RCF : L'Europe de la ruralité et l'Europe de la défense
Emission spéciale sur RCF depuis le Moment Gourmand au Chambon-sur-Lignon en Haute-LoireEmission spéciale sur RCF depuis le Moment Gourmand au Chambon-sur-Lignon en Haute-Loire
Salomé Jamon RCF Haute-LoireSalomé Jamon RCF Haute-Loire

Faut-il accélérer le mouvement et mutualiser les forces armées européennes ?

Je pense qu'il faut que la France conserve sa dissuasion. Contrairement à ce qu'a évoqué le président de la République, je pense que la dissuasion n'est pas un élément qui est mutualisable, qui est transposable au niveau européen. C'est un outil voulu par le général de Gaulle et on doit aujourd'hui respecter à la fois les contours et l'intérêt que cette dissuasion procure. 

Pourquoi ce n'est pas transposable ?

Écoutez, je crois qu'on a déjà beaucoup de difficultés à prendre des décisions à 27. Lorsque l'on en sera, ce que je ne souhaite pas bien sûr, à utiliser l’arme nucléaire, il ne sera pas question de discussions sans fin pour finalement pouvoir bénéficier de cette force de dissuasion. Je maintiens que la dissuasion est un outil de souveraineté nationale et non pas européenne. Alors on peut bien sûr évoquer des complémentarités, on peut évoquer le soutien de la France vers d'autres pays, On peut, avant d'en arriver à ce stade de la mutualisation de la dissuasion nucléaire, élargir les forces multinationales et pourquoi pas en arriver à des forces européennes. 

Et avoir des militaires qui arborent le drapeau Européen sur leurs uniformes ?

Oui, mais j'en reviens à ce qui s'est passé en Afrique de l'Ouest. La France était leader de la lutte contre le terrorisme. Nous avons eu jusqu'à 5200 hommes, à la fois au Mali, au Burkina Faso, au Niger, alors que les autres États membres en ont envoyé quelques milliers, pour ne pas dire quelques centaines de militaires…. Lorsque la Ministre des Armées, Florence Parly, a proposé de mettre en œuvre un rassemblement des forces spéciales qu'elle avait nommées Takuba, ça a été un échec parce que peu de pays ont répondu présent.

Une autre problématique importante, c'est l'OTAN. L'OTAN c'est à la fois une chance, mais c'est aussi un problème. L’Atlantisme nous protège d'un certain nombre de périls. On évoquait l'Ukraine. Mais je pense que tant que la France sera dans l'OTAN, nous aurons beaucoup de mal à constituer une sorte d'organisation européenne de défense.

Tant que la France sera dans l'OTAN, nous aurons beaucoup de mal à constituer une Europe de la défense 

Il faut quitter l’OTAN pour avancer vers une armée européenne ?

Non, je crois que les enjeux actuels ne portent pas sur le fait de quitter l'OTAN, mais de pouvoir, en complément de l'OTAN, construire une protection européenne. Et depuis l'agression de la Russie en Ukraine, il y a cette prise de conscience et cette volonté d'avancer vers une Europe de la défense à la fois stratégique et industrielle. Depuis des années, on parle à la fois de système de combat aérien du futur, censé remplacer nos Rafales. On parle aussi du char du futur mais cette collaboration industrielle a beaucoup de mal à émerger. Mais aujourd’hui, on constate que le couple franco-allemand, notamment, a évolué dans ses positions et que l'on arrivera prochainement, je pense, à un accord de principe qui devrait nous permettre d'avancer sur cet aspect industriel et stratégique.

 

Olivier Cigolotti, sénateur de Haute-Loire sur l'Europe de la défence

La France investit beaucoup d’argent dans son armée. Ce n’est pas le cas de tous les pays d’Europe. Les autres États Membres font-ils, eux aussi, assez d’efforts en la matière ?

La France fait beaucoup d'efforts, effectivement. Nous avons voté une loi de programmation militaire l'été dernier, pour la période 2024-2030. C'est 400 milliards d'euros soit plus de 2% du PIB. D'autres États membres font des efforts aussi conséquents, suite à l'agression de la Russie en Ukraine mais ils sont parfois très en retard. De notre côté, nous devons nous préparer, malheureusement, à ce qu'il y ait des agressions comme on le voit aujourd'hui.

Le Président de la République, Emmanuel Macron, n'exclut pas l’idée d’envoyer des troupes armées sur le front Ukrainien. Qu’en pensez-vous ?

Je crois que nous n'en sommes pas là. Pour l'instant, ce dont ont besoin les forces ukrainiennes, ce sont des munitions. Des munitions qui tardent à arriver, des munitions qui favorisent l'avancée des troupes russes dans le Donbass et on le voit tous les jours, malheureusement, les ukrainiens ont beaucoup de mal à la fois à résister mais aussi à percer les lignes russes. La priorité c'est la fourniture des munitions !

Un mot sur les élections Européennes du 9 juin prochain. Pour les jeunes générations, l’argument d’une Europe de la Paix semblait très éloigné. Que leur dites vous aujourd’hui ?

La Paix est fragile ! On le voit malheureusement avec ce qui se passe sur l'ensemble de la planète. Et l'Europe c'est la Paix, c'est la sécurité sur le continent, c'est la sécurité pour nos territoires. Et aujourd’hui nous avons besoin d’Europe. Et cela nécessairement par un vote qui marque l’adhésion de nos concitoyens à un projet d’une Europe unie.

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