La Pologne a été relativement épargnée par l’épidémie de Covid-19 avec à peine plus de 1400 morts à ce jour et cette épidémie est plutôt en recul. Il faut dire que la Pologne a pris rapidement des mesures fortes pour contenir celle-ci (fermeture des frontières, port du masque obligatoire, limitation très forte des rassemblements, etc.). Elle ne devrait donc pas poser de véritables risques pour l’élection de ce dimanche. Pour autant, la question est loin d’être anecdotique, puisque l’élection devait avoir lieu le 10 mai dernier, en pleine pandémie en Europe. Son annulation avait finalement été décidée à la suite de la forte crise politique causée par la volonté, dans un premier temps, du gouvernement conservateur de privilégier un maintien de l’élection par voie postale alors que la campagne était matériellement impossible à mener.
Le Président Duda du parti conservateur Droit et Justice joue sa réélection ce dimanche. Comment se présente l’élection pour lui ? La crise du Covid-19 et la récession qu’elle provoque risquent de fortement rebattre les cartes de la présidentielle. Il y a encore quelques mois, la réélection de Duda semblait acquise, tant la popularité du PiS est encore importante en Pologne. Mais la mauvaise gestion du report de la présidentielle et le risque d’une récession économique, qui pourrait remettre en cause les programmes sociaux introduits pour le PiS, ont, semble-t-il, quelque peu fait pâlir l’étoile du Président Duda. Il faut également dire que jusqu’à récemment, Plateforme civique, principal parti d’opposition, n’avait pas de candidat véritablement crédible. L’ancien président du Conseil européen et ancien premier ministre, Donald Tusk, avait ainsi renoncé à se présenter en fin d’année dernière suite à de mauvais sondages. Mais l’entrée en campagne du maire actuel de Varsovie, Rafal Trzaskowski, a changé la donne. D’après les plus récents sondages, il arriverait non seulement deuxième au premier tour mais pourrait bien remporter l’élection au second tour, où il fait pour l’instant jeu égale avec Andrej Duda.
L’élection du candidat du parti d’opposition (Plateforme civique) changerait-elle quelque chose à la politique polonaise et notamment à ce qui est généralement présenté comme un délitement de la démocratie polonaise ? Pas vraiment. En effet, l’essentiel du pouvoir est exercé par le gouvernement et notamment le premier ministre. Les prérogatives du Président polonais sont limitées selon la Constitution. Toutefois, le Président jouit d’un droit de veto qui lui permet de s’opposer aux projets du gouvernement, notamment lorsque ceux-ci menacent l’équilibre des pouvoirs. Ainsi, le Président Duda avait, à la surprise générale, opposé son veto au premier projet très controversé de réforme de la Cour constitutionnelle polonaise. L’élection de Trzaskowski serait donc avant tout symbolique mais permettrait de rétablir un certain équilibre des pouvoirs au plus haut niveau de l’Etat. Elle participerait probablement également à renforcer encore la polarisation de l’échiquier politique et de la société polonaise.
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