La patriarche Kirill est dans le viseur de l’Europe… Dans une sixième série de sanctions envers la Russie, la Commission européenne a proposé la semaine dernière de sanctionner 58 personnalités impliquées dans le conflit ukrainien dont le patriarche Kirill.
Pour la première fois dans l’histoire, un haut responsable religieux est mis en cause par l’Union européenne. Alors que le conflit en Ukraine n'en finit pas, la Commission européenne a proposé la semaine dernière de sanctionner 58 personnalités impliquées dans cette guerre, dont le patriarche orthodoxe russe Kirill. Est-il un oligarque comme les autres ? Pour Bernard Lecomte, journaliste spécialiste du Vatican et de l'Europe de l'Est, "le chef religieux qu'est le patriarche Kirill est très proche de Vladimir Poutine. Il est à peu près clair qu'il en a profité lui-aussi. Il a fait des affaires. Cet homme n'est pas seulement un chef religieux, c'est un ancien du KGB, c'est un ancien fonctionnaire et aujourd'hui il s'occupe aussi de ses affaires. Il a un chalet en Suisse et il a toutes les caractéristiques de tous ceux qui profitent du régime. Ne le comparons pas avec les autres oligarques mais prenons-le pour ce qu'il est".
Selon l’Union Européenne Etienne, Kirill est "l’un des principaux soutiens de l’agression militaire russe contre l’Ukraine". Depuis 2009, Kirill est la couverture politico-religieuse du Kremlin. Il n’hésite pas à bénir les armes et missiles, il soutient la répression de l’opposition et des médias indépendants. Comme Vladimir Poutine, il voit l’Ukraine et la Biélorussie comme des pays "frères" qui auraient dû rester russes... Aujourd’hui Kirill multiplie les déclarations de soutien à l’offensive russe en Ukraine. Pour lui les détracteurs des ambitions russes sont des "forces du mal".
"Le patriarche Kirill va jusqu'à bénir les troupes d'invasion russes en Ukraine. Cela paraît logique de l'interdire sur le territoire de l'Union européenne et de le désigner comme l'un des co-responsables de cette guerre dramatique qui a déjà fait des dizaines de milliers de morts. Il est non seulement quelqu'un qui fournit des couvertures religieuses à l'idéologie impériale du président Poutine. Il va jusqu'à dire des contre-vérités. Le 3 mai, lors d'un sermon au Kremlin, il a expliqué que la Russie n'a jamais attaqué personne. C'est de la propagande" explique Antoine Arjakovsky, historien et directeur émérite de l’Institut d’études œcuméniques de Lviv.
Un positionnement qui divise néanmoins au sein de l'Eglise orthodoxe russe. C’est un des enjeux fondamentaux du conflit en Ukraine. Les orthodoxes fidèles au patriarcat de Moscou représentaient 40% des orthodoxes en Ukraine. Mais depuis 2018 et la reconnaissance de l’autocéphalie par le patriarche Bartholomée, les Ukrainiens sont de plus en plus nombreux à rejoindre le patriarcat de Constantinople. Cela provoque un véritable schisme pour les orthodoxes russes, comme le rappelle Bernard Lecomte.
"L'orthodoxie russe est la communauté la plus importante du monde. La plupart des autres communautés orthodoxes sont ralliées à Constantinople. C'est le grand problème de cette affaire ukrainienne : les Ukrainiens étaient partagés entre les deux. Il faut bien comprendre que la plupart des orthodoxes ralliés au patriarcat de Moscou sont en train de couper les ponts. Il faut bien comprendre que c'est extrêmement important du point de vue de l'histoire des religions. C'est comme si tous les catholiques français et belges se coupaient du pape" précise le journaliste.
Le pape François veut jouer les médiateurs. Il s’est entretenu avec le patriarche Kirill. Le pape a raconté cet entretien dans le quotidien italien Corriere della Sera la semaine dernière. Les deux hommes n’ont pas réussi à se comprendre. Kirill a donné, un papier à la main toutes les justifications de la guerre. François de son côté, veut chercher des moyens de paix, arrêter le bruit des armes. Les deux hommes qui avaient prévus de se voir à Jérusalem le 14 juin ne se verront pas. Le pape propose désormais de rencontrer directement Poutine. Pas de réponse du Kremlin pour l’instant. Ces dernières années, le pape et le président russe se sont déjà rencontrés à plusieurs reprises. La dernière visite de Vladimir Poutine au Vatican remonte au 4 juillet 2019. En revanche, François ne s’est jamais rendu en Russie.
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